Jamais l'amour du bien ne s'allumera dans les
cœurs à travers toute la
population, comme il est nécessaire au salut du pays, tant
qu'on croira que
dans n'importe quel domaine la grandeur peut
être l'effet d'autre chose que
du bien.
C'est pourquoi le Christ a dit: «Un bon
arbre produit de beaux fruits, un
mauvais arbre produit des fruits pourris". » Ou une
œuvre d'art parfaitement belle est un fruit pourri, ou
l'inspiration qui la produit est proche de
la sainteté.
Si le bien pur n'était jamais capable de
produire ici-bas de la grandeur
réelle dans l'art, dans la science, dans la spéculation
théorique, dans l'action
publique, si dans tous ces domaines il n'y avait que de la
fausse grandeur,
si dans tous ces domaines tout était méprisable, et par suite
condamnable, il n'y aurait aucune espérance
pour la vie profane. Il n'y aurait pas d'illumination possible
de ce monde par l'autre.
Il n'en est pas ainsi, et c'est pourquoi il
est indispensable de discerner la
grandeur
réelle de la fausse, et de proposer à l'amour seulement
la première. La grandeur réelle est le beau fruit qui
pousse sur le bon arbre,
et le bon
arbre est une disposition de l'âme proche de la sainteté. Les
autres prétendues grandeurs doivent être
examinées froidement, comme
on examine
des curiosités naturelles. Si, en fait, la répartition sous
les
deux rubriques peut comporter des erreurs,
il n'en est pas moins essentiel
d'enfoncer au plus profond du cœur le principe même de la
répartition.
(
hcq: ...de la vraie grandeur celle en Coq... de la fausse grandeur
celle EN Coques ...dont la Coque de base est le Couple H&F
époux ?)
..........
1171
Le dogme du progrès
déshonore le bien en en faisant une affaire de mode....
1170
L'esprit de vérité,
de justice et d'amour n'a absolument rien à voir avec un
millésime....
1172
pour aimer la France,
il faut sentir qu'elle a un passé, mais il ne faut pas aimer
l'enveloppe historique de ce passé, il faut en aimer la
partie muette, anonyme, disparue. Il est absolument faux qu'un
mécanisme providentiel transmet à la mémoire de la postérité
ce qu'une époque possède de meilleurs. Par la nature des
choses, c'est la fausse grandeur qui est transmise. Il y a
bien un mécanisme providentiel, mais il opère seulement de
manière à mener les appelés de grandeur authentique a beaucoup
de fausse grandeur ; un ou deux les discernent. Sans eux nous
serions perdus.
La transmission de la
fausse grandeur à travers les siècles n'est pas
particulière à l'histoire. C'est une loi générale. Elle
gouverne aussi par exemple des lettres et les arts. (rs ...
et la science et même la religion dans certains cas...)
1173
Comment un enfant qui
voit glorifier dans les leçons d'histoire la cruauté et
l'ambition ; dans celle de littérature l'égoïsme, l'orgueil,
la vanité, la soif de faire du bruit ; dans celle des sciences
toutes les découvertes qui ont bouleversé la vie des hommes, sans
qu'aucun compte soit tenu ni de la méthode de la découverte ni de
l'effet du bouleversements ; comment apprendrait-il à admirer
le bien ?... Dans l'atmosphère de la fausse grandeur, il est
vain de vouloir retrouver la véritable. Il faut mépriser la
fausse grandeur.
1022
Tout
semble converger vers ce point de grandeur où, comme l'écrit
Simone
Weil,
«le génie créateur de beauté, le génie révélateur de vérité,
l'héroïsme,
la
sainteté sont indiscernables».
Tout prend sa source dans
la notion sacré,
en effet, et tout y converge.
En développant, en ouverture de son
«grand oeuvre», une
déclaration, non pas des droits mais des devoirs de
l'homme envers l'être humain, Simone Weil pratiquait consciemment
rupture avec l'idéologie
des droits de l'homme de 1789. C'est la lumière du
bien absolu dont l'exigence
habite au coeur de l'homme qui va imprégner tous les
développements qui suivent, car « la foi est plus réaliste que
politique réaliste». Les
grandes notions de liberté, de démocratie et de droits de
l'homme
appartiennent à ce qu'elle appelle la zone des valeurs
moyennes.
Surplombant ces valeurs moyennes, et destinée à les enrober et
à les élever à une
notion supérieure, que Simone Weil appelle le « bien pur» et
qui était
pour Platon le soleil du Bien, doit servir de ciment à une reconstruction
de la cité. «Au-dessus
des institutions destinées à protéger le droit, les personnes,
libertés
démocratiques, il faut en inventer d'autres destinées à
discerner et à
abolir tout ce qui, dans la vie contemporaine, écrase les âmes
sous l'injustice, le
mensonge et la
laideur»
* le texte en
italique est Florence de Lussy