La vraie grandeur.... par Simone Weil    

dossier : Simone Weil

                              

Ceci un extrait tiré de  L'Enracinement Plaidoyer pour une Civilisation nouvelle ....de Simone Weil.  

 

page 1164

Quatre obstacles surtout nous séparent d' une forme de civilisation susceptible de valoir quelque chose. Notre conception fausse de la grandeur ; la dégradation du sentiment de la justice ; notre idolâtrie de l'argent ; et l'absence en nous d'inspiration religieuse.

 

page 1175/1176

Jamais l'amour du bien ne s'allumera dans les cœurs à travers toute la population, comme il est nécessaire au salut du pays, tant qu'on croira que dans n'importe quel domaine la grandeur peut être l'effet d'autre chose que du bien.

C'est pourquoi le Christ a dit: «Un bon arbre produit de beaux fruits, un mauvais arbre produit des fruits pourris". » Ou une œuvre d'art parfaitement belle est un fruit pourri, ou l'inspiration qui la produit est proche de la sainteté.

Si le bien pur n'était jamais capable de produire ici-bas de la grandeur réelle dans l'art, dans la science, dans la spéculation théorique, dans l'action publique, si dans tous ces domaines il n'y avait que de la fausse grandeur, si dans tous ces domaines tout était méprisable, et par suite condamnable, il n'y aurait aucune espérance pour la vie profane. Il n'y aurait pas d'illumination possible de ce monde par l'autre.

 

Il n'en est pas ainsi, et c'est pourquoi il est indispensable de discerner la grandeur réelle de la fausse, et de proposer à l'amour seulement la première. La grandeur réelle est le beau fruit qui pousse sur le bon arbre, et le bon arbre est une disposition de l'âme proche de la sainteté. Les autres prétendues grandeurs doivent être examinées froidement, comme on examine des curiosités naturelles. Si, en fait, la répartition sous les deux rubriques peut comporter des erreurs, il n'en est pas moins essentiel d'enfoncer au plus profond du cœur le principe même de la répartition.

( hcq: ...de la vraie grandeur celle en Coq... de la fausse grandeur celle EN Coques ...dont la Coque de base est le Couple H&F époux ?)

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1171

Le dogme du progrès déshonore le bien en en faisant une affaire de mode....

1170

L'esprit de vérité, de justice et d'amour n'a absolument rien à voir avec un millésime....

1172

pour aimer la France, il faut sentir qu'elle a un passé, mais il ne faut pas aimer l'enveloppe historique de ce passé, il faut en aimer la partie muette, anonyme, disparue. Il est absolument faux qu'un mécanisme providentiel transmet à la mémoire de la postérité ce qu'une époque possède de meilleurs. Par la nature des choses, c'est la fausse grandeur qui est transmise. Il y a bien un mécanisme providentiel, mais il opère seulement de manière à mener les appelés de grandeur authentique a beaucoup de fausse grandeur ; un ou deux les discernent. Sans eux nous serions perdus.

La transmission de la fausse grandeur à travers les siècles n'est pas particulière à l'histoire. C'est une loi générale. Elle gouverne aussi par exemple des lettres et les arts. (rs ... et la science et même la religion dans certains cas...)

1173

Comment un enfant qui voit glorifier dans les leçons d'histoire la cruauté et l'ambition ; dans celle de littérature l'égoïsme, l'orgueil, la vanité, la soif de faire du bruit ; dans celle des sciences toutes les découvertes qui ont bouleversé la vie des hommes, sans qu'aucun compte soit tenu ni de la méthode de la découverte ni de l'effet du bouleversements ; comment apprendrait-il à admirer le bien ?... Dans l'atmosphère de la fausse grandeur, il est vain de vouloir retrouver la véritable. Il faut mépriser la fausse grandeur.

1022

Tout semble converger vers ce point de grandeur où, comme l'écrit Simone Weil, «le génie créateur de beauté, le génie révélateur de vérité, l'héroïsme, la sainteté sont indiscernables». Tout prend sa source dans la notion sacré, en effet, et tout y converge. En développant, en ouverture de son «grand oeuvre», une déclaration, non pas des droits mais des devoirs de l'homme envers l'être humain, Simone Weil pratiquait consciemment rupture avec l'idéologie des droits de l'homme de 1789. C'est la lumière du bien absolu dont l'exigence habite au coeur de l'homme qui va imprégner  tous les développements qui suivent, car « la foi est plus réaliste que politique réaliste». Les grandes notions de liberté, de démocratie et de droits de l'homme appartiennent à ce qu'elle appelle la zone des valeurs moyennes. Surplombant ces valeurs moyennes, et destinée à les enrober et à les élever à une notion supérieure, que Simone Weil appelle le « bien pur» et qui était pour Platon le soleil du Bien, doit servir de ciment à une reconstruction de la cité. «Au-dessus des institutions destinées à protéger le droit, les personnes, libertés démocratiques, il faut en inventer d'autres destinées à discerner et à abolir tout ce qui, dans la vie contemporaine, écrase les âmes sous l'injustice, le mensonge et la laideur»

* le texte en italique est Florence de Lussy

 

La force, fausse grandeur

Carnets de Simone Weil   .. quelques citations

suite du texte: aider la France à retrouver son âme 

résonances ....rs

En cette époque, où tout s'équivaut... retrouver au « plus profond du coeur le principe même de la répartition » basé sur la grandeur du bien... et non de la force ...paraît en effet primordial.

le 25 janvier 2003

 

 
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