Un livre
passionnant a été réédité aux Etats-Unis en 2005, « Born to Buy :
The Commercialized Child and the New Consumer Culture » (Né pour
acheter : L’enfant commercialisé et la nouvelle culture du
consommateur »), écrit par un expert de la consommation, Juliet
Schor, qui étudie les effets dommageables provoqués par la
publicité et le marketing sur les enfants. Selon cette enquête
capitale, la culture de la publicité jusqu’à saturation à laquelle
sont exposés nos enfants est à la source d’un faisceau de
symptômes psychosomatiques.
Juliet Schor, membre du conseil d’administration
du Center for a New American Dream (Centre pour un nouveau rêve
américain), a eu, pour la première fois, accès de l’intérieur aux
opérations de marketing destinées aux enfants et s’est aperçue que
des agences de publicité utilisaient de nouvelles méthodes,
insidieuses, pour les toucher. La publicité visant les enfants se
retrouve partout, depuis la télévision et le cinéma jusqu’à
l’Internet et même dans les salles de classe des écoles. Selon
cette étude, l’implication des enfants dans la culture de
consommation affecte leur bien-être. Les enfants qui ont participé
à l’enquête ont rapporté qu’ils souffraient de dépression,
d’anxiété, d’une perte de confiance en soi et de maux
psychosomatiques comme des maux de tête et des maux d’estomac,
attribuables à un haut niveau d’exposition à la publicité et à la
culture de consommation.
Les dépenses consacrées à la publicité et au
marketing visant spécialement les enfants se sont élevées à plus
de 15 milliards de dollars par an. Ce montant est susceptible de
s’accroître en même temps que l’augmentation du pouvoir d’achat
des enfants, estimé aujourd’hui à plus de 30 milliards par an de
dollars en achats directs. Devenus une cible primordiale pour la
publicité, les enfants influencent, pour une valeur supplémentaire
de 670 milliards de dollars, les dépenses de leurs parents. On
estime que l’enfant moyen regarde, par an, plus de 40 000 messages
commerciaux à la télévision. Selon un récent sondage réalisé par
le Center for a New American Dream, près de 8 Américains sur 10
(79 %) pensent que la publicité destinée aux enfants devrait être
plus restreinte. La majorité des Américains (87 %) estiment que la
culture de consommation qui est la nôtre ne facilite pas la
pénétration de valeurs sûres chez nos enfants.
« A tout moment dans mes interviews, j’ai
retrouvé le même phénomène : les gens du marketing se sentent
profondément coupables et mal à l’aise d’utiliser leurs aptitudes
à cibler des gamins avec des messages inappropriés, des produits
douteux et des techniques insidieuses », écrit Juliett Schor.
Parlant de leur fils, des parents interviewés
par Juliett Schor le présentent comme « le roi de la consommation
». Il était attiré par la télévision comme un papillon. Il a
tendance à être distrait et n’a pas toujours obtenu de bons
résultats à l’école. Il voulait acheter tous les produits dont il
voyait la réclame et il était perpétuellement en conflit avec ses
parents à ce propos. Ses parents se battaient pour réduire sa
consommation de médias électroniques.
Parmi les parents interviewés, un grand nombre
n’ont pas été confrontés à des problèmes aussi graves et beaucoup
ont imposé des régimes restrictifs impliquant la stricte
surveillance et la régulation de l’usage des médias. Les parents
qui restreignaient le plus l’accès aux médias disaient
généralement de leurs enfants qu’ils étaient en bonne santé, et
heureux dans leur vie scolaire et leur vie sociale ; pour eux,
leurs enfants n’étaient pas tellement hostiles aux règles qu’ils
leur imposaient.
Le livre « Born to buy » présente
six conseils pour aider les parents à
réduire le temps passé par leurs enfants devant la publicité :
1) Les parents doivent créer, et s’y tenir, des
règles définissant les moments, la durée et la nature des
émissions que les enfants pourront regarder. Ils peuvent choisir
de renoncer au câble. Ils ne doivent pas avoir peur d’élever leurs
enfants hors télévision. La clef du succès semble être de rester
constants, de fixer des règles adaptées aux besoins des enfants
individuellement, et de prévoir un emploi du temps laissant une
large place aux devoirs, au sport, aux activités para-scolaires et
aux jeux d’extérieur.
2) Les parents peuvent encourager les écoles et
les associations de parents d’élèves et professeurs à promouvoir
des débats et des ateliers sur des sujets tels que les programmes
de télévision, les films, l’usage des médias et les jeux vidéo.
Quand ces communautés se réunissent pour discuter de ces
questions, il se crée une certaine sensibilisation qui peut
aboutir à des approches communes. Les parents doivent être
également vigilants sur les publicités qui se glissent dans
d’autres médias électroniques comme l’Internet, les films et les
jeux vidéo.
3) Les parents peuvent communiquer avec d’autres
parents pour contrôler les choix alimentaires. Ils peuvent se
consulter avant les « sleepovers » (un « sleepover » est une fête
pour enfants ou jeunes ados qui viennent dormir (ou plutôt passer
la nuit) à la maison d'un de leurs copains. Les Anglo-Saxons
parlent aussi de « pyjama parties » — NDT] et s'assurer, avec les
parents hôtes, que les vidéos projetées ou les CDs seront
convenables. Les adultes doivent communiquer et coopérer pour
établir un environnement sans danger et sain pour leurs enfants.
4) Les familles qui réussissent le mieux à tenir
à distance cette culture de société ont des solutions de rechange
: démarrer un club de lecture parents-enfants, organiser un
événement sportif avec les voisins ou une nuit du cinéma en
famille. Il existe d’autres activités populaires comme les jeux de
société après l’école, le travail du bois et les promenades dans
la nature. Selon un sondage du Center for a New American Dream, 69
% des enfants (âgés de 9 à 14 ans) aimeraient passer plus de temps
avec leurs parents.
5) Aujourd’hui, avec l’augmentation de l’obésité
chez les enfants, les parents devraient éviter d’acheter les
toutes dernières cochonneries. A la place, ils peuvent essayer
d’habituer les enfants dès leur plus jeune âge à une nourriture
saine. Il est important pour des parents de se souvenir qu’il faut
tenir bon et lutter contre la tendance des enfants à céder au
marketing agressif des publicitaires.
6) Les parents qui tiennent à réduire
l’influence de la culture commerciale sur leurs enfants doivent
mettre leurs actes en conformité avec leurs paroles : il est bien
plus difficile à des parents de limiter la télévision quand ils la
regardent beaucoup eux-mêmes. Les parents qui désirent pour leurs
enfants un style de vie moins inspiré par la publicité doivent
changer de comportement en même temps que leurs enfants.
New American Dream
http://www.newdream.org/kids/borntobuy.php
« Born to buy : The Commercialized Child and the
New Consumer Culture », par Juliet. B. Schor, éditions Scribner
Book Company, Reprint oct. 2005, 292 p.
Une traduction en espagnol a été éditée en avril 2006 : « Nacidos
para comprar, traduction Juanjo Estrella, éditions Translatio.
Ce livre, destiné à l’école des parents, mériterait une traduction
en français.
Traduction de l’américain par R.S.
© Polémia
02/10/06