par Daniel SCHNEIDERMANN
QUOTIDIEN Libération : vendredi 18 novembre 2005
Quels extraordinaires révélateurs, les
explosions sociales ! Elles déblaient l'horizon. On n'y voyait plus
rien. On ressassait toujours les mêmes rengaines. Soudain, un pan de
réalité se découvre. Depuis des années, un discours diffus décrivait des
«quartiers sensibles» noyautés par les «barbus», gangrenés par des
trafics d'armes, en provenance directe de Tchétchénie. Et qu'a-t-on vu,
depuis trois semaines ? Des adolescents ou de jeunes adultes, mus par
l'injustice, qui incendient des voitures avec des bouteilles d'essence.
D'armes de guerre, aucune trace, heureusement. Quant aux «barbus», sous
réserve d'inventaire, ils ont plus souvent joué le rôle de force
d'interposition que de leaders de l'insurrection. Il est vrai qu'un
fantasme chasse l'autre. A peine évacué celui des «réseaux tchétchènes»,
voici celui de la polygamie. Les incendies ? La faute à la polygamie. La
colère ? La polygamie, vous dis-je.
Le fonctionnement des médias eux-mêmes
est passé au même bain de révélateur. Ainsi, ces quelques semaines de
crise ont-elles révélé leur proximité avec le pouvoir. Plusieurs
exemples. Ayant filmé par hasard des policiers en train de frapper un
homme à terre à La Courneuve, France 2 a décidé de ne diffuser l'image
qu'après l'avoir montrée au ministère de l'Intérieur, et sollicité sa
réaction. Le même soir, elle a donc pu faire suivre l'image choc de la
ferme réaction du ministre (la suspension des policiers tabasseurs).
Jusque-là, on peut comprendre. Mais, cette précaution n'ayant
apparemment pas suffi, la directrice de l'information de la chaîne
publique, Arlette Chabot, a aussi décidé de ne pas mettre en ligne, sur
son site Internet, le journal télévisé contenant la fameuse scène. Et
là, on ne comprend plus du tout. Pourquoi, alors, l'avoir diffusée à
l'antenne ? Soit cette image, dûment et prudemment contextualisée,
constitue une information pour les téléspectateurs, et on la diffuse.
Soit non, et on ne la diffuse pas du tout.
Surtout, si l'on met le doigt dans cet
engrenage, si l'on considère qu'il existe des images à deux vitesses,
comment distinguera-t-on les dangereuses des anodines ? Des images
boutefeux, après tout, il en est de toutes sortes. Pourquoi France 2
n'a-t-elle pas retiré de son site les JT dans lesquels on voit brûler
des voitures ? Pourquoi n'expurge-t-on pas des archives les éloquentes
évocations des «racailles» ou du Kärcher par le ministre de l'Intérieur
? Et, tiens, demain Arlette Chabot retirera-t-elle du site Internet ces
accusations invérifiées de polygamie ? On ne sait jamais ! Si quelqu'un
allait en faire mauvais usage !
Plus largement, ce sont des réflexes
de toutes sortes, le plus souvent largement inconscients, que la crise
met brutalement en lumière. Ainsi du statut des différentes paroles.
Tout en bas, la parole des jeunes émeutiers. Celle-là, on n'a pas de
pincettes assez longues pour la manier. France 3, qui a enregistré le
témoignage d'un camarade des deux jeunes électrocutés de
Clichy-sous-Bois, assurant qu'ils étaient bel et bien poursuivis par des
policiers, attend trois jours avant de diffuser ce document. Sans doute
le temps de le laisser refroidir. En revanche, les premières réactions
de Villepin ou de Sarkozy assurant le contraire et prétendant que
l'intervention policière était consécutive à un cambriolage (thèse
démentie par la suite) sont diffusées immédiatement, sans vérification,
par tous les médias audiovisuels.
Allons, objecteront les journalistes,
ce sont des paroles de ministres. Et s'ils sont ministres, ils ont des
informations. Nous pouvons donc présumer leurs propos, sinon vrais, au
moins fondés. Ainsi, par exemple, les médias avaient-ils justifié leur
emballement lors de la fausse agression du RER D. Puisque le Président
et le ministre de l'Intérieur lui-même (à l'époque Dominique de Villepin)
accréditaient la version de l'agression antisémite, alors aucun besoin
de vérifier avant de faire la une sur la monstrueuse agression, qui se
révéla ensuite tout aussi imaginaire que le cambriolage de Clichy. Même
inconsciente et informulée, cette conviction des gens de médias témoigne
d'une confondante naïveté. Il faudrait, d'urgence, rappeler que tout
pouvoir est présumé menteur, à commencer par le pouvoir politique, et
évidemment la police. Et en tout cas, le premier réflexe professionnel
devrait consister à ne croire personne aveuglément.
Visuellement, les dispositifs des
émissions de plateau reproduisent une inégalité comparable. La noblesse
au centre, le tiers au poulailler : la salle du Jeu de paume,
aujourd'hui, c'est le plateau d'Arlette Chabot, qui installe les élus au
centre de la scène et filtre les interventions de la piétaille, entassée
dans les gradins. Que paraisse Sarkozy, et il peut monologuer à son
aise. Mais qu'un invité encapuché se fourvoie dans une tirade un peu
absconse, et Chabot le coupe d'un sec : «Je ne comprends pas ce que vous
dîtes.» Pourquoi pas, d'ailleurs ? Mais il faudrait interrompre
pareillement les ministres (comme le fera quelques jours plus tard Yves
Calvi sur la même chaîne, dans une émission nettement plus égalitaire).
Images à plusieurs vitesses, paroles à plusieurs statuts, fauteuils
d'orchestre et strapontins : la situation quasi insurrectionnelle
éclaire crûment cette inégalité. Et tout cet éventail de dispositifs
ne dit pas seulement que les médias défendent le pouvoir. Il dit surtout
qu'ils sont le pouvoir.

le 8.11.05
http://forum.subversiv.com/index.php?id=97323
Troubling “Facts” of the Paris Riots
How our newspapers
might turn bias
to balance.
by Bruce Thornton
voir l'article complet sur
http://victorhanson.com/articles/thornton110605.html
Private Papers
The media's techniques for
smuggling opinion into what are supposed to be news stories are so
pervasive that often we don't even notice when they are at work.
Here's an example from the Friday, November 4 New York Times, in a
story about the Muslim riots in Paris. Most of the article simply
describes the events and the political fallout for various French
politicians.
It's in the last paragraph that the
reporting of news gives way to disguised opinion: "The continuing
unrest appears to be fueled less by perceived police brutality than by
the frustration of young men who have no work and see little hope for
the future." In Saturday's coverage, this opinion migrates to the
front of the story, with references to "underlying frustrations" and "decades
of high unemployment and marginalization." To statements such as these
any perceptive reader should respond, "Says who?"
Notice the use of the impersonal
weasel-word "appears." Appears to whom? The Times writer, a French
politician, an academic, an imam, or the rioters? The way this opinion
is phrased obscures the fact that it is a mere opinion, an
interpretation of the events described, not a fact. As such, the
source of the opinion should be identified so we can evaluate its
usefulness and integrity. But to say it "appears,” unconnected to a
person with a point of view, is an evasion of responsibility. If this
explanation was deemed so important for the story, then surely the
reporter could have found someone to give him a quote expressing the
opinion so that at least we'd know whose ax is being ground. And a
thorough reporter would be sure to find other people with alternative
interpretations in order to provide balance and give the reader a
fuller range of opinion on the matter. Without this sort of
attribution, however, the opinion then must be that of the writer and
the editors of the Times. At which point we need to be asking why a
newspaper that continually proclaims its professional objectivity is
putting opinion into what's supposed to be a news story.
But it's not just the concealment of
the opinion's source that is troubling. The opinion itself reflects a
certain ideology, a set of modern prejudices about human behavior. To
attribute the riot to "frustration" and "no work" is to indulge a
highly questionable view of human action that reduces it to
environmental forces outside the individual. This materialist
determinism — the idea that material causes in the environment,
especially economic ones, are the prime mover of humans — is not a
scientific fact but an ideological prejudice whose roots lay in
pseudo-scientists like Marx and Freud. It discards the fact of human
free will and ignores the many complex and conflicting motivations of
people that explain their actions. Sometimes people burn and loot out
of economic frustration and hopelessness; sometimes they do so because
of the innate joy in destruction and in the power that such
destruction temporarily bestows; sometimes they do so because they
want stuff for free; sometimes they do so in pursuit of some value or
ideal; and sometimes they do so just for the sheer hell of it.
voir suite ...
Troubling “Facts” of the Paris Riots
Sources et autres détails
le 23/11/2005 22:43:58, France Malade IS BACK a écrit :
sources :
http://france-echos.com/actualite.php?cle=7692
"Faits & Documents, n° 205, 1er au 15 novembre 2005
http://www.forum-politique-actualite.net/read.php
?
* Le 9 novembre, en fin d'après-midi,
dans le cadre des mesures décidées par Dominique de villepin (mais
évidemment non rendues publiques), le dispositif Emeraude a été mis
en place: il permet de détourner l'ensemble du trafic Internet vers
des serveurs militaires équipés de filtres, qui suppriment ou bloquent,
fournisseur par fournisseur, certains sites pour les rendre
inaccessibles. Plusieurs méthodes ont été utilisées: Free a utilisé le
blocage net de l'IP dans les routeurs; chez Wanadoo, ce sont les noms de
domaines DNS seulement qui ont été bloqués; chez Cegetel, ce sont les
adresses http qui ont été filtrées, etc. La plupart des sites et blogs
interdits d'accès n'étaient nullement les nombreux brûlots musulmans ou
islamistes qui ont fleuri ici ou là (oumma, majlis, etc.) mais les sites
nationalistes les plus dynamiques comme occidentalis, sosfrance, coranix
ou france-echos).
* Les internautes hostiles aux
émeutiers étant particulièrement remontés, nombre des forums de dialogue
des journaux et médias ont été fermés d'autorité par leurs dirigeants.
France 5 indiquait: «Devant la teneur particulièrement violente de la
majorité des messages du forum consacré au thème de cette émission, nous
avons décidé de le supprimer. Nous supprimerons également les fils
traitant de ce thème et postes dans les autres forums, car hors sujet. »
2 000 messages ont aussitôt été effacés.
* De même TF1 a indiqué: «Compte tenu
du nombre de réactions envoyées, il est devenu impossible de les publier
avec toute la rigueur, l'objectivité et la réactivité qui caractérisent
un forum de qualité. Nous sommes donc contraints de suspendre
momentanément la publication des avis sur ce sujet hautement sensible.»
* Le forum cybermilitant.org,
notoirement proche de l'UMP, a également préféré fermer son site devant
l'afflux de messages appelant à «tirer dans le tas» et à envoyer
l'Armée. L’UMP a toutefois acheté temporairement un certain nombre de «
mots-clés» chez google, de manière à ce que toute personne tapant «
émeute» ou « incendie de voitures» puisse adhérer à l'UMP :