Bitru
a-t-il
retenu quelque choses
des dernières
guerres, et quoi ?
Quand on lui parle de l'Irak,
Bitru plisse les yeux d'un
air rusé. C'est que, voyezvous, ce coup-là on ne la lui fera pas
:
il
sait très bien qu'il ne s'agit que de
pétrole et de
sordides histoires d'intérêts.
Bitru
n'est jamais dupe. Et, patelin, il
parachève avec un soin maniaque
sa préparation à la
guerre précédente "Manque
pas un bouton de guêtre"...
pendant que loin de ses yeux
s'organise
la suivante.
Le voilà donc
tentant de déchiffrer par
la méthode "Ba-be-bi-bo-bu"
de savants
et inextricables hiéroglyphes dont, bien
sûr, il ne
comprend pas le premier mot.
Qu'importe
A 82 %
Bitru et ses pareils
se regroupent derrière notre ver*
national et virtuel Nobel
de la Paix, avec
Villepin
et BHL, qui
avoue que
«
cette
fois,
il
ne
sait
plus
».
Villepin comme BHL .
plaidaient pour les
bombardements des Serbes
en Bosnie, puis au Kossovo. Ils
en rêvaient, Chirac le
fit.
Faut-il en
conclure qu'ils ne souhaitent
la guerre que sur
le sol européen, comme
la Démocrate Mad Albright, mutine
allumeuse de
guerre
qui minaudait
«A
quoi sert
d'avoir
une si
belle
armée pour ne pas s'en servir
? »
Et, le 12 mai 1996, justifiant la politique
de sanctions de l'administration
Démocrate Clinton
devant Leslie Stahl, journaliste de CBS, qui annonçait qu'un
demi-million d'enfants étaient morts en
Irak, Mad
répondit «
Nous
pensons
que
ce prix en
vaut la
peine.
»
La grande presse
internationale ou locale
n'en fit pas ses grands titres. Argument
d'autorité : Mad savait ce qu'elle
disait, aucun petit journaliste
n'irait lui demander des
comptes. Six ans plus
tard, les stéréotypes reviennent
sans rougir et les démocrates
retrouvent leur rôle de gauche
sociale et humaine,
pacifiste pour tout dire.
Du coup,
les partisan de la guerre
morale, comme BHL ou Villepin,
qui participaient la
veille au martèlement
anti-Saddam, prennent des mines songeuses, morales et humanitaires,
et s'interrogent gravement :
"Est-ce là le
rôle de la France, mes frères,
est-ce bien le rôle de la
France généreuse ?"
Et les voilà
qui nous jouent, avec le
couplet patriotique chanté à l'ONU, un
remake
nostalgique de la France des
années 60.
On s'étonnera peut-être de me voir faire
la fine bouche devant des positions qui
sont celles de la plupart des collaborateur
du
Libre
Journal.
Mais
la question n'est pas là. La question est de
savoir si cette
transformation des faucons
d'hier en vieilles chouettes bienveillantes
est crédible.
Comment croire que les mêmes qui
hier appelaient à l'écrasement des
Serbes sont sincères quand ils refusent
aujourd'hui, au nom de la même morale,
la guerre contre l'Irak ?
N'y aurait-il
pas là plutôt une redistribution des
rôles ?
Si les enjeux pétroliers étaient seuls en
cause, les compagnies pétrolières
auraient déjà joué leur rôle de modérateur.
Depuis près
d'un siècle, Français
et Anglo-Saxons sont
associés dans ce
domaine. Les accords
Sykes-Picot ont servi
de premier cadre à
cette entente cordiale
là et, 50 ans plus
tard, l'accession de
l'Algérie à
l'indépendance a été organisée,
quoi que l'on en ait dit, sous tutelle
anglo-américaine par De Gaulle, qui
n'eut jamais les
moyens d'une indépendance qu'il se
borna à mimer 30 ans durant en
espérant que la réalité suivrait.
Nous le savons aujourd'hui, ce ne fut
pas le cas. Et
notre empire, qui se flattait d'être
autosuffisant au lendemain de la
guerre, fut démantelé par la mutation
mondiale, la métropole se trouvant
ébranlée par de profonds
bouleversements qui la
rendirent chaque jour plus
soumise à
l'étranger.
Mais cette évidence est encore niée par ceux-là mêmes qui devraient
en être les
plus conscients. Et les questions ne
sont donc pas
posées comme elles le
devraient.
Ainsi, personne
ne s'interroge sur l'unanimité
de la presse hexagonale contre
cette "guerre
américaine", dix ans après
que la même
unanimité a rassemblé la
même presse en
faveur d'une autre
guerre américaine en Yougoslavie.
Ce basculement
général autour d'un
axe unique (l'axe
du mal, bien sûr)
devrait pourtant donner matière à réflexion.
Est ce que cela
ne ressemble pas à une
sorte de
complaisance narcissique dans
l'illusion
que la France a encore un
rôle à jouer
dans la réorganisation
(recolonisation
?)
de la planète
?
Et cette
illusion, ne faut il pas qu'elle ait été
entretenue
?
Ne dirait-on pas que notre pays a été
chargé,
dans une nouvelle répartition des
rôles, de "gérer" l'Afrique en y
maintenant l'ordre (ou le
désordre) le temps
nécessaire à la réorganisation
voulue. Et qu'il est d'autant
plus désigné pour ce rôle qu'il aime depuis longtemps
à se donner, à la face du monde,
les airs d'une aïeule
bienveillante des
démocraties, assumant jusqu'au bout
son rôle moral et
humanitaire... Nous
autres, gentils citoyens, héritiers
des Lumières, sommes d'autant
mieux armés pour de
telles missions que nous
regorgeons d'autorités morales
telles le petiot docteur
Kouchner, et que notre
bon peuple est tout
pénétré de
l'importance de sa
partition dans le concert des
nations.
Ainsi, pendant que la
France éternelle s'époumonne dans
son flûtiau, le citoyen charmé se désintéresse
de la situation intérieure du
pays et
entonne les vieux succès de
Paul Déroulède, conformément à l'image
que le monde a de lui.
Il en est désormais ainsi de ces monuments
en travaux où, sur la bâche qui
les
recouvre, on voit l'image peinte du
bâtiment tel
qu'il ne sera plus jamais
après sa
restauration.
Pour le moment donc, notre
presse
ses
hommes, (ses
méthodes et se méthodes) est mise
en question
;
et l'on
voit apparaître des
documents
sur
Le Monde,
qui ne
serait
pas à la hauteur de sa réputation d'objectivité...
Rodrigue qui l'eût dit, Chimène
qui l'eût cru
?
Et voilà le monde médiatique livré, une
fois
de plus, à une de ces
crises de
nerfs générales dont il a le secret, et
qui
pousse chacun aux pires extrêmités.
N'a-t-on pas vu, voilà quelques années,
le gros July, souverain poncife de
Ration, s'emporter
jusqu'à parler de
déontologie
!
Cette fois c'est Villepin qui
va jusqu'à
imaginer «
une CNN
française
au
service
de
la francophonie ».
TV5 ne lui suffit
donc pas
?
En janvier dernier, cette chaîne câblée
regroupant des programmes belges,
canadiens,
français, suisses, diffusait une curieuse fiction canadienne.
On y
voyait, à Montréal, des barbouzes françaises
intriguant
pour détourner les
ressources
d'eau potable québécoises
au profit
d'une multinationale française.
Le film,
diffusé dans le monde entier
pour
assurer la promotion des tueurs
français,
était subventionné par le gouvernement
canadien (toujours rattaché au Commonwealth).
Nous sommes
plus que jamais dans
une époque
de pervers polymorphes. Si nous
l'envisageons avec des idées simples, que ce soit au moins en
connaissance de cause.
Parler de la presse
comme du "quatrième
pouvoir" est un abus de langage. La
presse est une composante
du pouvoir
dont le nom est l'argent et elle ne saurait
exister en dehors
de l'argent que comme
soupape.
Voilà pourquoi c'est maintenant
seulement que les "citoyens" ont le
droit d'accéder à des
analyses qu'ils
auraient pu lire dans
Le
Libre
Journal lors de la guerre du
Kossovo.
Pendant la Grande Semaine du Pacifisme,
les "citoyens" ont le droit de
comprendre, en promotion,
que toutes les
guerres ne sont pas humanitaires.
Que certaines n'ont pour
motif que l'intérêt
pour la maîtrise de richesses naturelles,
comme le pétrole
par exemple (l'eau,
on en parlera plus tard...)
En somme, comme
d'habitude, on permet à Bitru de comprendre la dernière
guerre. Pour savoir ce
qu'il en est de la prochaine, il devra attendre q'elle soit
finie.
Ces petits bouts de vérité lâchés n'ont
pour
objet que de permettre d'intégrer
les
séquelles du précédent conflit et de
masquer les enjeux globaux de la
restructuration (toujours
cette bonne vieille
perestroïka)
en cours.
La
nouvelle guerre d'Irak, comme celles
qui suivront en Amérique
latine, en Afrique,
en Asie centrale, n'est qu'un épisode
du remodelage de la planète entière.
L' organisation finale de l'Utopie. Il reste
donc quelque chose à comprendre.
Joyeuse bonne nuit
!
Michel Blanzat
* Chirac a été
comparé à un ver par la presse anglaise...
tard, l'accession
de
l'Algérie à l'indépendance a été organisée,
quoi que l'on en ait dit, sous tutelle
anglo-américaine par De Gaulle, qui
n'eut jamais les
moyens d'une indépendance qu'il se
borna à mimer 30 ans durant en
espérant que la réalité suivrait.
Nous le savons
aujourd'hui, ce ne fut
pas le cas. Et
notre empire, qui se flattait d'être
autosuffisant au lendemain de la
guerre, fut démantelé par la mutation
mondiale, la métropole se trouvant
ébranlée par de profonds
bouleversements qui la
rendirent chaque jour plus
soumise à
l'étranger.
Mais cette
évidence est encore niée par ceux-là mêmes qui devraient en être les
plus
conscients. Et les questions ne
sont donc pas
posées comme elles le
devraient.
Ainsi, personne
ne s'interroge sur l'unanimité
de la presse hexagonale contre
cette "guerre
américaine", dix ans après
que la même
unanimité a rassemblé la
même presse en
faveur d'une autre
guerre américaine en Yougoslavie.
Ce basculement
général autour d'un
axe unique (l'axe
du mal, bien sûr)
devrait pourtant donner matière à reflexion.