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Présentation :..
Avec la
mondialisation voilà que "nous découvrons, de ce fait ( que ni Kant ni
Hegel n'envisageait), que nous pensons en langue" ( François Jullien De l'universel, de l'uniforme du
commun et du dialogue des cultures)
Ci dessous
quelques extraits du livre
La genèse
du féminin Fécondité de l'esprit et pensée
biblique
d'Alain
Monestier
en vue de la rencontre
PO au 18
du 25.09.10
Et concernant
notre rencontre du 20.03.10
la Vérité Vérités....
et
une faculté de
leur esprit qu'ils ignorent
en
relations '
( septembre 09
>>>:
)
relationnalité ...anima-animus
..
famille...foyer où se cultive, de génération en génération, de l'art
d'aimer ....L’art d’aimer. d'Ovide
.//une belle " épître réparatrice " de Jacques Trémolet de Villers
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La Genèse du
féminin
Fécondité de l'esprit et
pensée biblique
Alain
Monestier
Page 4 de
couverture
Au-delà d'une organisation
exemplairement complexe, Alain Monestier perçoit dans les textes
bibliques un mode de pensée singulier, propre selon lui a provoquer
une mutation décisive de nos mentalités. Derrière le thème de
l'amour conjugal -- que la Bible utilise comme modèle de la vie de
l'esprit -- il décèle en effet la présence d'un « paradigme de
fécondité » qu'il trouve tout à fait un accord avec la nature
foncièrement créatrice de l'esprit humain et avec la capacité de
l'homme à devenir cet « être source » dont parlait Maurice Zundel.
Scrutant les récits émettant
perspective, il s'efforce de montrer qu'à travers l'union des sexes
la Bible nous représente la pensée comme le produit d'un accord
amoureux et poétique qui marie l’idéation et le rêve ; nous appelons
ainsi à découvrir le rôle éminent du « féminin » dans la vie féconde
de l'esprit et à entrer dans une relation « mystérieuse » dans le
processus apparaît curieusement cohérent avec les données de la
science contemporaine.
Alain Monestier, né en 1945,
partage sa vie entre la peinture (il est ancien élève de l'école des
Beaux-Arts) et les sciences humaines (et les chercheurs dans un
grand musée d'ethnologie). Ici particulièrement intéressé au
processus de création à l'oeuvre dans l'activité littéraire et
artistique, notamment dans la culture populaire. Résolument
pluridisciplinaire, ses recherches ont été éclairées par une
fréquentation quotidienne de la Parole de Dieu.
Coût du livre : 18 EUR
disponible via amazon.com 17.10 EUR livraison comprise ( si vous
n’avez pas internet je peux vous le commander) .>>>>>Alain Monestier
EXTRAITS
Date :
20.09.09
Préambule
page 11 à 15
On peut distinguer trois façons d'exprimer une
idée et donc de se représenter le monde. La première - typique de la
culture occidentale - cherche à la cerner avec exactitude ; dans
l'idéal, c'est une définition scientifique. La seconde est propre à
ces- sagesses de l'Asie qui appréhendent l'univers de façon globale
et ne sauraient séparer la partie de la totalité ; la pensée y
suggère plutôt qu'elle ne définit. La troisième façon consisté à
faire exister l'idée mentalement en multipliant les points de vue et
en faisant foisonner le sens par un jeu subtil d'inter-relations
;
c'est ainsi que procède la Bible. Dans le premier cas, l'idée gagne
en précision ce qu'elle perd en contenu ; sa richesse est en
proportion inverse de son exactitude. Dans le second, l'esprit
prétend embrasser la totalité du monde mais il y perd de sa rigueur.
Dans le dernier cas enfin, la pensée court le risque de tomber dans
l'ambiguïté, mais c'est pour convoquer en elle l'infinie diversité
de la Création.
De ce dernier mode d'expression, saint Jean a tiré
un parti exemplaire. Son évangile adopte en effet la forme
mnémotechnique du « filet » qui est un mode de composition
caractéristique de la culture orale judéo-chrétienne'. Il s'agit
d'un texte "en spirale" qui revient systématiquement sur les mêmes
thèmes en leur apportant à chaque passage un éclairage
supplémentaire et en les mettant en perspective les uns avec les
autres. C est pour l'apôtre le moyen d'approfondir progressivement
son enseignement et de structurer l'esprit de ses disciples afin de
les faire entrer dans des mystères ineffables qu'une expression
conceptuelle et univoque ne manquerait pas de trahir.
Pareil mode d'expression pallie l'effet réducteur
qu'un discours linéaire implique toujours peu ou prou ; et la
structuration qu'il impose aux textes évoque évidemment le modèle de
ce que nous appellerions aujourd'hui une « pensée complexe ». En se
complémentant, les paraboles de la Bible ne produisent-elles pas un
sens qui dépasse la somme de leurs contenus, et ne nous
introduisent-elles pas dans une cosmologie à niveaux de réalité que
ne saurait appréhender une pensée homogène ? Le grand mérite de ce mode
de composition est de permettre à l'esprit de fonctionner en abîme
et, par la multiplication des échos qu'elles s'y renvoient,
d'intégrer les idées dans une pensée globale et plurielle propre à
refléter l'insondable mystère des choses.
Cette structure complexe dans laquelle les mots et
les images se répondent ne suffit pourtant pas à cerner la
conception de la vie de l'esprit qu'induisent les textes bibliques.
Par un certain nombre de métaphores et de récits, les Écritures nous
donnent sur l'acte de penser un enseignement qui ne se limite pas
aux aspects mécaniques de l'idéation, mais touche à ce qu'il y a de
vivant dans ... l'esprit humain. Elles construisent en somme une
anthropologie de la vie mentale bien différente de celle qui
sous-tend notre mentalité occidentale, avec son incorrigible besoin
de schématiser le réel et de le dominer.
« On juge l'arbre à ses fruits. » Par ces mots
Jésus donne la clé d'un mode de pensée dont l'idée de « fécondité >>
pourrait constituer le paradigme ; étant entendu que cette métaphore
ne s'applique pas seulement à la vie morale mais s'étend à toute
l'activité de l'esprit, depuis le niveau de la raison pratique la
plus élémentaire jusqu'à celui de ses plus hautes expériences
intellectuelles et spirituelles.
L'esprit des hommes de la Bible n'est ni le «
Logos » des philosophes grecs, ni le « Tao » des disciples de
Lao-Tseu ; il fait plutôt penser au « Melta » ; c'est-à-dire à la
Parole de Dieu en tant qu'Elle s'incarne, agit et féconde ; au «
Verbe » en tant qu'il est Créateur. Et la justesse de l'idée n'y est
pas seulement attestée par son adéquation au réel, ou par sa
consonance avec la réalité secrète du monde, mais par la saveur de
ses fruits et par le caractère vivant du processus qui les génère ;
un peu comme une peinture de paysage dont la valeur ne tient pas à
l'exactitude avec laquelle elle reproduit le spectacle de la nature . mais au souffle de vie qui anime, de l'intérieur, l'univers "
plastique dont elle émane.
Etant donné son propos, on trouvera pour le moins
normal que cet ouvrage s'inspire d'un tel mode de composition.
La
vie de l'esprit est son objet
et ce n'est pas une notion qu'on
saurait, sans dommage, faire tenir dans une définition. On ne peut
l'atteindre qu'à travers des approches successives, par « empilement
de modèles » et à force de points de vue décalés. Aussi le lecteur
ne devra-t-il pas s'étonner d'une écriture qui lui donnera peut-être
l'impression de battre la campagne, d'un cheminement qui, chapitre
après chapitre, le fera revenir sur les mêmes thèmes et sautera
volontiers « du coq à l'âne » en passant, sans trop de transition
parfois, de l'exégèse scripturaire à l'histoire de l'art ou dune
considération sur la sexualité à des remarques portant sur des
sujets aussi divers que l'architecture, la poésie ou la science.
Renonçant à produire un discours de type
apodictique le livre suivra cette démarche que les rhétoriciens
désignent du nom de « conglobation ». Elle consiste à exposer une
proposition par une convergence d'arguments non décisifs par
eux-mêmes, et elle suppose qu'on se contente de faire vivre l'idée
au lieu de vouloir la démontrer à tout prix Cela reviendra à
illustrer par l'exemple une modalité de la pensée que nous croyons
caractéristique de la Bible • une modalité très singulière à
laquelle nous voudrions rendre le lecteur sensible en procédant
comme la Bible le fait elle-même, c'est-à-dire en nous gardant
d'enfermer notre propos dans une formulation théorique, mais en
enrichissant sa compréhension par l'évocation d'une large variété de
domaines et la conjugaison de différents niveaux de sens.
Le lecteur enfin ne devra pas
s'étonner qu'à côté des métaphores de la nutrition et de la relation
amoureuse qui charpentent dans la Bible la représentation de la vie
mentale, nous ayons accordé à l'histoire de l'art et à l'analyse de
la création artistique une place qui pourra sembler
disproportionnée. Pour notre propos, en effet, il s'agit d'un
domaine privilégié ; non seulement parce qu'il est celui dans lequel
l'auteur peut faire état d'une modeste expérience personnelle, mais
surtout parce que la fécondité de l'esprit y est évidemment l'enjeu
essentiel et que ses mécanismes secrets s'y dévoilent souvent avec
évidence à travers le témoignage de l'artiste et les problématiques
qu'il exprime.
.........
I. Le crime de Sodome ou
l'esprit stérile
L'Ancien Testament contient deux textes qui
portent clairement sur la vie de l'esprit et se font évidemment
écho. Il s'agit d'un côté du Cantique des cantiques et de l'autre du
récit du châtiment de Sodome qui en est comme le pendant négatif.
Là, les transports amoureux de deux jeunes fiancés évoquent la,
relation de l'âme humaine avec son Créateur ; ici, la métaphore de
l'homosexualité sert à stigmatiser la perversion dont cette relation
est menacée. Empruntant la symbolique de la vie sexuelle et mettant
ainsi en perspective la tendance réputée la plus animale de l'homme
avec l'activité la plus élevée de son esprit, ces deux passages se
conjuguent pour nous ouvrir à l'intelligence, non seulement des
réalités spirituelles, mais aussi, nous essaierons de le montrer,
aux mécanismes mentaux à l'oeuvre à tous les niveaux de la pensée
humaine.
Nous reviendrons largement sur ce que le Cantique
nous enseigne, mais c'est sur l'histoire de Sodome qu'il nous faut
d'abord nous pencher
* * *
À lire ce texte déconcertant, on est d'abord
frappé par l'ambiguïté du comportement qu'il prête à Dieu. Le
terrible châtiment qu'Il inflige aux Sodomites fait en effet suite à
l'épisode de l'intercession d'Abraham où se manifeste son extrême
clémence.
Pour Le dissuader d'anéantir tous les habitants de
cette ville « dont les crimes sont montés jusqu'à Lui », le père des
croyants ose faire monter vers le Trône céleste une prière qui frise
l'insolence :
Vas-tu vraiment supprimer le juste avec le
pécheur ? Peut-être y a-t-il cinquante justes dans la ville ?
Vas-tu vraiment les supprimer et ne pardonneras-tu pas à la cité
pour les cinquante justes qui sont dans son sein ? Loin de Toi
de faire cette chose-là ; faire mourir le juste avec le pécheur,
en sorte que le juste soit traité comme le pécheur ! Loin de toi
! Est-ce que le juge de toute la terre ne rendra pas justice ?
(Genèse 18, 25).
À celui qui ose l'interpeller de la sorte,Yahvé
répond bien sûr qu'Il pardonnera en considération de ce petit nombre
; et le texte enchaîne sur un habile marchandage
par lequel Abraham essaie de sauver la ville à
meilleur compte, tout en prenant conscience, au fil des mots, de son
incroyable audace
Que mon Seigneur ne se mette pas en colère,
dit-il, mais peut-être des cinquante justes en manquera-t-il cinq :
feras-tu, pour cinq, périr toute la ville ?
Et Abraham poursuit sur sa lancée, devant Yahvé
qui se laisse facilement fléchir et semble disposé à sauver tous les
pécheurs. Mais le Père des croyants ne pousse pas son avantage
jusqu'au bout ; sans qu'on puisse bien dire si c'est par crainte ou
parce qu'il sent que la clémence du ToutPuissant a ses limites, il
renonce à faire descendre son enchère au dessous de dix justes ; si
bien que sa plaidoirie nous laisse sur une incertitudé quant aux
limites de la clémence divine.
Ainsi, avant de rapporter la destruction de la
ville, le texte prend-il soin de sauver, par l'artifice de ce
dialogue préliminaire, l'image d'un Dieu miséricordieux et « lent à
la colère » ; et surtout, il nous laisse entendre que, même si Dieu
le voulait, le péché des sodomites ne pourrait être l'objet d'aucune
rémission de Sa part. Pour le croyant, c'est là une révélation
terrible : il _existe un crime que le Tout-Puissant Lui-Même n'a pas
le pouvoir d'effacer.
* * µ
Or, ce déni de rémission de la part d'un « Dieu de
bonté » ne peut pas ne pas rappeler au chrétien le grave
avertissement que les Évangiles mettent dans la bouche de jésus
En vérité, je vous le dis, tout sera remis aux
enfants des hommes, les péchés et les blasphèmes tant qu'ils en
auront proférés ; mais quiconque aura blasphémé contre l'Esprit
Saint n'aura jamais de rémission ; il est coupable d'une faute
éternelle (Marc 3, 28-29).
À rapprocher ces textes de l'Ancien et du Nouveau
Testament, une évidence s'impose : si le « blasphème contre l'Esprit
Saint » est le seul péché qui ne trouve pas de rémission auprès de
Dieu, c'est que les moeurs des Sodomites renvoient à une faute
d'ordre spirituelle dont la conséquence est une rupture totale avec
Dieu.
Telle est du moins l'hypothèse sur laquelle nous
allons maintenant avancer.
* *
Avant d'entrer dans l'analyse du texte, il
convient toutefois de faire ici une mise au point relative à
l'homosexualité.
Le caractère métaphorique du récit doit nous faire
quelque peu relativiser la condamnation sans appel dont elle semble
être l'objet, aussi bien dans l'Ancien Testament que dans les
lettres de Paul. À prendre ces textes au pied de la lettre, à se
laisser entraîner par la violence de leur rhétorique, on les
trouverait en flagrante contradiction avec le Catéchisme d'une
l'Église Catholique qui condamne ce dérèglement avec fermeté
mais ne voue pas pour autant ceux qui en sont affligés à la
damnation éternelle.
Certes, l'apôtre ne manifeste pas à leur égard une
indulgence excessive ; « Ils n'ont pas d'excuse » lance-t-il sans
ménagement ; mais, sans vouloir relativiser cette condamnation, il
faut comprendre qu'elle porte moins sur la sodomie en tant que telle
que sur le comportement mental déviant qu'elle symbolise ; qu'elle
vise une dépravation de la pensée susceptible de faire mourir
l'esprit humain en le rendant aussi infécond qu'un amour homosexuel.
Paul est dur, blessant même, mais il faut prendre ses paroles comme
celles d'un médecin qui force le ton pour faire réagir un malade. Et
s'il s'en prend ainsi aux homosexuels, c'est parce que l'opprobre
dont la culture de son temps les charge est seule à pouvoir donner à
ses auditeurs la mesure de l'aversion que devrait leur inspirer un
vice qui risque de tuer leur âme.
Sans doute le parallèle entre la sodomie et la
perversion spirituelle n'est-il pas gratuit. Dans l'esprit des
auteurs bibliques cette métaphore doit renvoyer à une réalité
psychologique profonde. Mais une juste lecture de ces textes suppose
quand même qu'on oublie la condamnation morale et qu'on se cale sur
le sens de la parabole, en se demandant ce qu'à travers les traits
de caractère et les comportements prêtés aux Sodomites, elle entend
nous faire comprendre relativement à la vie de l'esprit et aux
dangers qui la menacent.
Il est significatif à ce sujet que les reproches
que Paul leur adresse ne portent pas sur l'impureté de leurs moeurs
mais sur leur refus de recevoir la vérité.
Alors qu'ils connaissaient Dieu, dit-il, ils
ne lui ont rendu, ni l'honneur, ni l'action de grâce dus à Dieu.
Au contraire, ils se sont perdus dans leurs discussions, et leur
conscience aveugle est devenue ténèbres...
Oui, ils ont préféré le mensonge à la vérité de
Dieu (Ro 1, 21-25).
C'est évidemment à une altération de la
connaissance et à un vice de l'esprit qu'il pense et que renvoie la
Genèse.
* *
Outre la capacité qu'il lui prête de contaminer
tout le peuple - « sans exception, depuis les jeunes jusqu'aux vieux
» (Genèse 19,4) - ce que le récit stigmatise d'abord dans
l'homosexualité, c'est la violence qu'elle met au coeur de l'homme
et son extrême dangerosité sociale. Malgré les supplications de Lot,
qui tente de les amadouer en leur offrant la virginité de ses
filles, les Sodomites sont prêts à tout pour assouvir leur passion.
C'est d'une voix menaçante qu'ils s'écrient : « Où sont les hommes
qui sont venus chez toi cette nuit ? Amène-les nous pour que nous en
abusions. » Et il faut la force surnaturelle des Anges pour qu'ils
ne fracassent pas la porte de la maison et ne fassent pas un mauvais
sort à son propriétaire.
Ce danger est par ailleurs d'autant plus
redoutable qu'il n'est pas évident. Une société peut-elle vraiment
se trouver menacée par une « orientation sexuelle » qui, après tout,
est affaire de vie privée ? Épargnés par la contagion, les gendres
de Lot ne se soucient pas de se mettre à l'abri. À leur beau-père
qui leur commande : « Debout, quittez ces lieux, car Yahvé va
détruire la ville », ils répondent par un haussement d'épaule. Et il
faut dire que job lui-même ne semble pas très conscient du danger.
Pour le décider à fuir, il faudra, non seulement que les envoyés le
prennent par la main et l'entraînent avec les siens hors des murs de
la ville, mais aussi que Dieu intervienne en personne, en lui
lançant cette objurgation : « Sauve-toi, sur ta vie ! Ne regarde pas
derrière toi et ne t'arrête nulle part dans la plaine, sauve-toi à
la montagne pour n'être pas emporté. » Le fléau est tel que la fuite
est le seul parti possible. S'il ne s'agissait que d'homosexualité,
on ne comprendrait évidemment pas pareille urgence et surtout que
les habitants soient tous menacés par la contagion. A-t-on jamais vu
une population livrée tout entière à la sodomie ? À l'évidence le
récit vise un mal d'une tout autre nature.
* * *
On sait que la tradition hébraïque fait de la
montagne le lieu privilégié de l'expérience mystique._ Aussi, le
fait que Yahvé invite Lot à y trouver refuge revêt-il une singulière
importance. Le recours à ce symbole confirme que la vie spirituelle
est le véritable objet du récit. Seule sa relation avec Dieu
permettra à Lot d'échapper au danger que symbolise le vice des
sodomites ; à ce danger de la perversion de l'esprit qui,
contrairement à l'homosexualité, peut fort bien atteindre une
population tout entière, en banalisant des pensées perverses qui
ruinent la fécondité de l'âme.
C'est un danger si redoutable que Dieu exige de
ceux . qu'Il veut sauver un total renoncement aux compromissions du
monde et il n'est pas étonnant que job se fasse un peu tirer
l'oreille. Dans un premier réflexe en effet, il demande la
permission d'aller se réfugier à Çoar - « la 4 ville de peu de chose
». Dans la plaine où elle est située, il espère jouir d'une vie
médiocre et insouciante ; et pour justifier sa demande, il prononce
cette phrase par laquelle il décrit à son insu le schéma de la vie
spirituelle dans laquelle il sera bien obligé de s'engager s'il ne
veut pas périr : « Je ne puis pas me sauver à la montagne sans que
m'atteigne le malheur et que je meure » ; autrement dit :
il n'y a pas de vie spirituelle possible
sans prendre sa croix et mourir a soi-même.
La réponse de Dieu est favorable, mais le danger
ne souffre pas de demi-mesure. À Çoar, Lot se sent toujours menacé
et c'est de lui-même qu'il décide de quitter cette ville de la
plaine pour gagner les hauteurs et y trouver refuge dans une grotte,
image symbolique de la vie intérieure.
* * *
Le crime de Sodome, le crime que l'homosexualité
symbolise et que Yahvé ne peut pardonner, c'est donc bien ce «
blasphème contre l'Esprit » dont parle jésus ; et le récit de la
Genèse s'attache non seulement à en souligner le danger mais aussi à
pointer ce qui en fait l'extrême gravité. Le texte est en effet
placé entre deux passages qui se font visiblement écho et qui
portent sur le même thème : celui de la fécondité. C'est un procédé
classique de composition orale qui permet de désigner la « pointe de
la parabole », c'est-à-dire sa signification essentielle en
l'occurrence que la fécondité est la raison d'être de la sexualité
comme de la vie de l'esprit.
Le premier de ces textes célèbre la
toute-puissance du Très-Haut. Il rapporte l'apparition de Membré et
le rire incrédule que le message des trois envoyés inspire à Sarah,
la femme stérile : dans son grand âge, alors qu'elle a « cessé
d'avoir ce qu'ont les femmes », elle va donner une descendance à son
époux.
Le second texte, plus déroutant encore, relate la
fécondité incestueuse des filles de Lot. Privées d'époux, elles
enivrent leur père, puis s'unissent à lui dans son sommeil afin d'en
être enceintes. Dans un cash comme dans l'autre Dieu donne la vie,
ce qui est le signe de sa bénédiction, car dans la tradition
hébraïque la naissance d'un enfant est toujours une grâce, quelles
qu'en soient les circonstances.
Or, si la maternité de Sarah est parfaitement
légitime, on ne peut pas en dire autant de celle des filles de Lot
et on serait tenté de trouver quelque chose de scandaleux à
l'indulgence que Yahvé manifeste à leur égard. Même si leur
intention est louable - elles veulent « susciter une descendance à
leur père » - l'inceste est considéré comme le crime abominable par
excellence qui sera expressément condamné par la Loi d'Israël.
Si le châtiment de Sodome a pour épilogue cette
curieuse histoire d'inceste, c'est évidemment pour stigmatiser
l'homosexualité et bien marquer que c'est son infécondité qui la
condamne. Le Tout-Puissant pourra effacer toutes les fautes, même
l'inceste, parce que l'inceste n'est pas incompatible avec une
fécondité qui peut toujours, d'une manière ou d'une autre,
s'inscrire dans son dessein. Mais parce qu'elle est stérile, il ne
pourra jamais pardonner la pratique homosexuelle ; entendue bien sûr
dans son sens métaphorique.
* * *
On remarque que, dans la composition du texte, le
combat spirituel - symbolisé par la fuite vers la montagne - fait
écho à la fécondité du couple - exprimée par la maternité de Sarah
et des filles de Lot. Ce croisement associe significativement les
thèmes de la vie de l'esprit et de la relation conjugale ; comme
s'ils devaient se servir l'un à l'autre de modèle et de clé de
compréhension.
Et il faut aussi voir que le récit se déroule dans
le contexte d'une violence qui obère aussi bien la fécondité du
couple (les Sodomites refusent de s'unir aux filles vierges de Lot)
que celle de l'esprit (elle transforme sa femme en statue de sel.
En somme, dans l'homosexualité des Sodomites comme
dans la perversion de l'esprit c'est toujours la violence que la
Genèse dénonce ; et c'est peut-être ce qui explique l'étymologie de
Gomorrhe : émorâh, la ville dont le nom est associé à celui
de Sodome : 'imour, qui signfie « maltraiter ».
Pour conclure, le récit de Sodome est tout entier
centré sur le thème de la fécondité qui apparaît ainsi comme le
paradigme de la pensée ; et au-delà de son enseignement moral, le
texte donne ici une sévère mise en garde sur le risque que prendrait
l'homme à l'ignorer. Il empêcherait Dieu de lui communiquer Sa vie
et de le faire participer à Son oeuvre de Création.
Cette fécondité, il va maintenant nous falloir la
situer dans l'univers mental des hommes de la Bible ; en cherchant à
comprendre l'idée très particulière qu'ils se faisaient de la vie
intime de leur esprit.
II. Un verbe qui prend chair ou le paradigme de
fécondité
page 29
Pour établir que la Bible fait de la « fécondité
de l'esprit » le paradigme de la pensée, sans doute faudrait-il
constituer une véritable « anthropologie de la vie mentale ». Un tel
projet risquerait toutefois de prendre une ampleur « hégélienne »
qui serait sans commune mesure avec les dimensions de ce modeste
essai et avec les compétences encore plus modestes de son auteur. En
abordant la pensée sous l'angle de l'anthropologie, je me garderai
donc bien de vouloir bâtir un quelconque système, me limitant à
évoquer les « gestes mentaux » qui sous-tendent la pensée humaine et
qui permettent selon moi de distinguer les cultures, par-delà leurs
productions, en comparant les gestuations qu'elles mettent
secrètement en œuvre dans la conscience.
En empruntant à Antoine de la Garanderie la notion
de « geste mental »,je veux parler en premier lieu de ces mouvements
du corps auxquels l'homme associe inconsciemment l'activité de son
esprit. Mais je reprends aussi à mon compte l'idée de « mimisme »
forgée par Marcel Jousse pour désigner l'acte qu'il considère le
plus essentiel de la vie mentale : le fait que pour connaître les
choses extérieures, l'esprit humain « rejoue » intérieurement les
gestes et les postures qui les caractérisent : la nage sinueuse du
poisson, la pesée sur le sol d'une masse inerte, la contorsion d'une
racine. Par cette activité intérieure, systématiquement sollicitée
dans les cultures de « style oral » (en particulier dans ce monde
judéo-chrétien étudié par Jousse) l'homme cherche plus à
s'incorporer le réel, à le faire vivre dans sa chaire, qu'à s'en
donner un équivalent virtuel. Aussi, pour appréhender cette
conception de l'esprit propre à la Bible, convient-il de pratiquer
sur la pensée une sorte d'épochè qui laissera de côté son
aspect purement réflexif pour se concentrer sur la gymnastique
mentale qu'elle implique.
Pour exemple d'une telle démarche, prenons
l'activité mentale à l'oeuvre dans le simple fait de regarder la
nature. L'homme qui s'y livre peut la ressentir de deux façons
différentes: ou bien il a l'impression que sa pensée se promène au
dehors pour constituer ce qu'il a sous les yeux en un paysage; ou
bien il a le sentiment que sa conscience cela s'imprégner par ce
spectacle. Il peut en somme associer ce qui se passe dans son
cerveau à des gestes physiques opposés : celui de « se projeter » et
en quelque sorte de s'imprimer comme un moule sur une argile
fraîche, et celui « d accueillir », à la manière de l'argile qui
reçoit l'emprunte.
Le lien qu'il fait spontanément entre l'activité
de son esprit et les mouvements de son corps, enracine l'activité
cognitive de l'homme dans sa sensualité ; de telle sorte que son
esprit entretient avec les objets extérieurs une relation quasi
charnelle qu'on ne saurait ramener à une interface exclusivement
conceptuelle dont les options extrêmes seraient le réalisme et le nommalisme de la fameuse « querelle des universaux ».
Ces gestes intérieurs, c'est à peine si nous en
sommes conscients et si nous l'étions nous serions naturellement
enclins a les croire innés ; alors qu'ils sont à l'évidence
largement déterminés par notre culture. Il faut se défaire de
l'idée
selon laquelle les activités élémentaires de la vie mentale
participeraient d'une nature humaine réputée universelle et
immuable. Selon les civilisations auxquelles ' ils appartiennent,
les hommes ne font pas tout à fait la même chose quand ils pensent.
Il suffit pour s'en convaincre de comparer les figures dont les
artistes se servent comme allégories de la pensée. Leurs œuvres y
laissent transparaître ces différences que les cultures ont enfoui
dans les profondeurs de l'inconscient. Que l'on pense a ces Bouddhas
dont l'esprit paraît s'anéantir en un vide intérieur, ou à cet ange
de Reims dont un sourire mystérieux semble au contraire dilater
l'âme et le corps ; sans oublier l'incontournable Penseur de Rodin
et son anatomie torturée par les convulsions d'une diarrhée
spéculative. À l'évidence, ce n'est pas à la même gymnastique
intérieure que ces trois personnages se livrent ! Pour penser,
celui-ci se vide, celui-là se gonfle» et le dernier se contorsionne
comme un malheureux !
(page 32 )
Pour sentir la réalité de cette gestuelle de
l'esprit et le conditionnement qu'elle est susceptible d'exercer sur
nos façons de voir le monde et de le penser, rien de plus éloquent
que de considérer l'art du paysage, en comparant ^ les principes
auxquels il obéit en Chine et en Occident.
Avec la perspective convergente, l'artiste
occidental , s'efforce de reproduire la nature ; et pour cela, il
l'intègre ; dans un espace qu'il rend homogène en l'organisant
autour de sa propre personne. C'est en effet uniquement de
l'endroit à partir duquel le peintre « construit » sa perspective
que les lignes de fuite peuvent s'ordonner avec justesse et donner à
la représentation sa parfaite cohérence illusionniste. Cette
conception qui a si longtemps prévalu chez nous est évidemment
révélatrice de l'attitude d'un esprit dominateur qui soumet la
nature par son regard ; et le geste mental que fait spontanément
l'artiste issu de nos civilisations consiste à projeter sa pensée
sur le monde afin de l'organiser selon son intelligence ; à en faire
en quelque sorte un microcosme où il régnera en maître.
Tout autre est l'évocation de la nature par la
peinture chinoise. Dans cette tradition en effet, l'artiste
n'organise pas le monde à partir de l'endroit qu'il occupe ; et il
ne se soucie pas d'assigner à chaque élément du paysage sa place
exacte dans une composition rigoureuse. Avec lui, l'image fonctionne
toujours peu ou prou à la manière d'un panoramique le long duquel le
regard se déplacerait librement. Cet artiste en somme ne fige pas le
monde autour de lui ; on pourrait dire qu'il le laisse
vivre de sa
propre vie et se contente d'accueillir les signes qu'il en
reçoit sans chercher à les intégrer dans une perspective homogène à
laquelle il imposerait les lois de sa propre intelligence.
En étudiant ces traditions picturales, il faut
d'ailleurs remarquer que ces gestes mentaux sont cohérents avec le
traitement qu'on y fait de la figure humaine. Il laisse en effet
deviner deux manières très différentes d'envisager la relation de
l'homme avec le milieu. Dans la peinture occidentale, le personnage
occupe volontiers une place prépondérante ; la nature étant conçue
comme un simple décor et lui servant d'écrin. À l'époque classique
point de paysage dont une scène animée ne soit le prétexte et il a
fallu une longue évolution à l'art occidental pour que le paysage
soit reconnu comme un sujet à part entière. En Chine, au contraire,
le primat est à la nature. Elle est l'objet essentiel d'une
composition où, reléguée au rayon des accessoires, la silhouette
humaine sert plutôt de repère. En somme, le peintre occidental
construit le paysage autour de l'homme qui est « la mesure de toutes
choses », alors que son homologue chinois incorpore cet homme dans
la trame d'un univers qui l'engloutit et où il semble chercher sa
route à tâtons. D'un côté, un homme au regard souverain qui ordonne
l'univers et le garde à distance ; de l'autre, un homme très
différent qui se laisse docilement noyer dans le monde qui l'entoure
; et l'on sent bien que ce qui les différencie l'un de l'autre
relève en profondeur d'un engagement charnel et des gestes mentaux
singuliers que chacun privilégie.
Cet exemple de la peinture de paysage nous fait
sentir que la confrontation des civilisations ne saurait se résoudre
par un échange purement idéologique ; que pour comparer les cultures
et essayer de faire vivre ensemble les hommes dont elles ont éduqué
le regard, il convient de mettre un peu de côté leurs productions
littéraires et artistiques, leurs dogmes et leurs croyances et de se
placer sur le plan de l'anthropologie, en s'intéressant en priorité
à ces représentations de la vie mentale qui sous-tendent l'activité
de l'esprit et la conditionnent toujours dans une certaine mesure.
C'est en tout cas ce que nous incitent à faire les travaux de Jousse
et de Lagaranderie ; deux pédagogues qui se sont intéressés à la
gestuelle mentale et à la part que le corps prend dans la production
et dans l'expression de la pensée.
Cet individu qui observe, raisonne, analyse,
comment a-t-il l'impression que son cerveau fonctionne ? Quel geste
se figure-t-il que son esprit fait en pensant ? Vit-il son attention
comme un flux tendu ou comme un mouvement ondulatoire ? Sa pensée se
focalise-t-elle sur son objet ou se donne-t-elle au contraire du
recul comme pour le survoler ? Est-ce qu'elle soupèse ou est-ce
qu'elle tranche ? Est-ce une flèche qui va droit à son but ou un
fragile équilibre qui se cherche ? Lui paraît-elle univoque ou lui
donne-t-elle l'impression d'une nébuleuse complexe et hésitante,
propre à se cristalliser en une multitude de combinatoires
imprévisibles ? Telles sont les questions qu'il convient de se poser
avant de comparer les productions d'une pensée humaine
qui engage
l'homme dans tout son être et dans laquelle nous avons trop tendance
à ne voir qu'une mécanique purement formelle et une combinatoire de
concepts.
*
**
(page 35 )
A les aborder sous le seul angle de la gestuelle mentale, on est
tenté de répartir les cultures en trois grandes familles ; en les
faisant correspondre aux notions qu'elles ont élaborées pour
désigner le principe de la connaissance : le logos pour la Grèce
antique, le H pour la Chine et le menrah pour le monde de la Bible.
Ce sont les trois notions de base qui pourraient contribuer à
structurer une éventuelle anthropologie de la pensée.
Ce qui, dans les trois cultures, détermine en premier lieu les
gestes mentaux, c'est l'idée qu'on s'y fait de la position
réciproque de l'esprit qui connaît et du monde extérieur, ou, pour
parler comme les professeurs de philosophie,
de la relation du sujet et
de
l'objet. Afin de donner au lecteur une vision plus
concrète de ces trois attitudes, je vais lui proposer une image.
Elle met en scène trois baigneurs autour d'une piscine.
Le premier de ces baigneurs est un philosophe grec. Assis au bord
du bassin, il observe l'eau en se livrant à des spéculations sur sa
nature. Mais l'idée ne lui vient pas d'y plonger le bout du doigt ;
de sorte qu'il n'est sûr, m de ses conjectures, ni même de
l'existence de cet élément liquide qu'il voit là devant lui, mais
pourrait aussi bien n'être qu'une illusion, inspirée par quelque «
mauvais génie ». Comme Descartes, la seule chose dont il soit
vraiment sûr, c'est de l'existence de sa propre pensée.
Le second baigneur est un sage chinois. Les yeux ouverts, il est
totalement immergé dans la piscine et il a de ce qui l'entoure une
vision très floue. Mais surtout, il distingue assez mal son corps de
l'eau dont la fraîcheur le pénètre ; de sorte que ce sont les
limites de sa propre personne qui lui posent question.
Quant au troisième baigneur, le voilà qui prend un
gobelet, le plonge dans le bassin, le remplit et en absorbe le
contenu ; de sorte que sa connaissance de l'eau est indissociable
de ce qu'il sent s'opérer à l'intérieur de son corps.
Ce baigneur-là est un homme de la Bible.
On comprendra facilement qu'à des relations si
différentes entre l'homme et son milieu ne s'appliquent pas les
mêmes « gestes mentaux ». L'esprit ne peut pas se comporter de la
même façon selon que le sujet s'imagine être à l'intérieur ou à
l'extérieur de l'objet de sa connaissance ; et à fortiori s'il a le
sentiment que cet objet pénètre en lui pour à la fois s'y dissoudre
et le changer. Ainsi, la pensée de notre baigneur grec se
configurera-t-elle spontanément à des gestes volontaires tels que :
« projeter », « séparer », « distinguer », «circonscrire » ; bref à
des gestes qui imposeront leur loi à la matière. Au contraire, notre
Chinois verra plutôt sa pensée « adhérer » à la réalité environnante ou « se fondre » en elle ; un peu comme un instrument
de musique qui se met au diapason de l'orchestre. Quant à l'activité
mentale de notre Hébreu, elle fera plutôt penser — et cette image
n'est pas gratuite — à un métabolisme.
•
* *
(page 37 )
Fût-ce d'une manière schématique, il convient
d'évoquer ici les types de rationalité qui, dans ces trois pôles
culturels, sont censés sous-tendre l'activité de l'esprit. On le
fera en comparant d'abord notre logos grec avec ces notions de
li et
de tao, propres à cette civilisation chinoise dont on a pu dire
qu'elle était « l'autre pôle de l'expérience humaine ». On situera
ensuite par rapport à ces deux traditions, l'idée hébraïque de
menrah, c'est-à-dire l'idée d'une pensée qui, à l'instar de
l'Esprit de Dieu, s'incarne pour donner vie.
L'anthropologie sous-jacente à la pensée grecque -
et à sa suite à la philosophie occidentale, induit donc un principe
d'altérité qui pose le sujet et l'objet comme radicalement
extérieurs l'un à l'autre. Aussi, dans cette tradition, la
possibilité de connaître est-elle liée au point de savoir si
l'hiatus qui les sépare peut ou non être franchi ; en d'autres
termes si la cohérence du logos peut rendre compte de celle de
l'objet qu'il vise. La question qui, tout au long de son histoire,
n'a cessé de hanter la pensée occidentale fut celle de la conformité
du réel avec son idée : cette fameuse « adaequatio rei et
intellectus » chère à saint Thomas d'Aquin.
Ce doute sur la validité de la connaissance a
trouvé sa première expression dans le fameux « mythe de la caverne »
; texte fondateur qui montre l'homme prisonniers de l'illusion,
coupé du réel et obligé à un effort pour en trouver, ou plutôt en
retrouver le chemin. Après Platon et son idéalisme, la question a
trouvé des réponses dans le « concrétisme » d'Aristote et dans le
nominalisme de Guillaume d'Occam ; avec la querelle des universaux,
elle a fourni son fond de commerce à la scholastique médiévale et
elle est toujours restée au cœur de la philosophie moderne ; même
avec la phénoménologie qui a pourtant prétendu dépasser l'opposition
traditionnelle entre l'être et l'apparaître et a considéré
l'essence comme une donnée immédiate de la conscience, susceptible
d'être saisie en dehors de toute pensée réflexive.
Dans l'univers philosophique qui naît en Grèce.
l'homme a tendance à se vivre comme une pure intellectualité et à
considérer la réalité comme une étrangeté radicale. Et quoi qu'elle
ait tenté pour dépasser ce schéma, pensée occidentale a toujours été
hantée par l'idée que quelque part entre l'esprit de l'homme et le
monde, le lien était irrémédiablement rompu.
C'est dans un tout autre univers mental que nous
plonge la pensée chinoise. Elle inscrit le sujet et l'objet dans un
continuum et n'opère pas sur la réalité extérieure ce travail de
détermination et de fragmentation auquel nous nous livrons si
spontanément. Non seulement le regard n'y découpe pas la trame du
monde en objet totalement distincts, mais l......... p38
*
* *
Si opposés qu'ils soient, ces deux modes de
connaissance ont en commun de consister en une saisie de l'objet par
la pensée ; même si cette saisie s'opère de deux façons différentes
: ici par la distanciation du regard et l'entremise du concept ; là
dans une sorte d'osmose par laquelle l'esprit s'insinue dans la vie
secrète des choses. Dans les deux cas
la pensée joue le rôle d'une
interface entre l'esprit et le monde : dans l'un en le construisant,
dans l'autre en se fondant en lui et en en recueillant l'empreinte.
Il en va tout autrement avec la Bible. La
connaissance y ressemble plutôt à un processus d'incarnation par
lequel l'objet se mettrait à exister à l'intérieur du sujet et
transformerait sa conscience. Ici la
pensée ne se contente pas de restituer la réalité en s'en donnant un
équivalent mental et elle ne consiste pas non plus en une relation
fusionnelle entre l'objet et l'esprit. Pour emprunter au vocabulaire
de Marcel Jousse, elle connaît cette réalité en la rejouant
intérieurement. Et cette démarche est essentiellement différente,
car c'est une chose que l'esprit reflète le monde et ses mutations
et c'en est une tout autre qu'il participe à sa création en
refaisant les gestes qui l'animent.
* * *
(page 40 )
Ce mécanisme mental, la Bible l'exprime à travers
deux métaphores complémentaires : celle de la relation amoureuse
dont nous avons déjà parlé et sur laquelle nous allons longuement
revenir et celle de la nutrition qui est caractéristique des
civilisations de « style oral » et que Jésus applique à son propre
enseignement quand il déclare : « La Parole que Je vous donne est
vraie nourriture. »
Ici, la pensée n'est pas la production ou la
réception par la conscience d'une image mentale ou d'un concept,
mais un processus d'habitation de cette conscience par un objet qui,
en s'y déployant, la modifie. C'est en somme, transposé au plan de
l'esprit, le mécanisme mental d'ingestion d'un aliment qu'un
processus de digestion transforme en vie.
Si, comme je l'ai fait pour les traditions occidentale et
chinoise, il me fallait associer cette modalité de la connaissance à
une école de peinture, je proposerais volontiers l'art byzantin de
l'icône. Son principe en effet ne consiste ni à construire, comme
dans l'art occidental, une représentation du réel, ni à susciter un
sentiment de communion avec l'univers, comme le fait l'art chinois,
mais pour ainsi dire à rendre l'objet figuré présent dans la
conscience du spectateur. Dans la liturgie orthodoxe ce n'est pas
l'image du monde divin que le fidèle embrasse et vénère, c'est ce
monde lui-même qu'il touche ; et c'est afin de susciter sa présence
que l'artiste a recours à cette perspective « divergente » qui lui
est si particulière. Cette facon de figurer l'espace consiste à
faire converger les lignes de fuite, non vers l'horizon de la
représentation, mais au contraire à l'avant du tableau, vers
l'endroit d'ou il doit être contemplé. Aussi, au lieu d'avoir
affaire à un microcosme fermé que le spectateur observerait de
l'extérieur, ou à une trame dans laquelle il faudrait que son regard
s'insinue, on a ici un système qui donne l'impression d'une invasion
de l'esprit par la réalité représentée ; une invasion
http://www.pagesorthodoxes.net/trinite/trinite-agr-cadre.htm
http://a6.idata.over-blog.com/340x481/2/55/45/76/Ic-nes/Tretyakov.jpg
http://peinture.video-du-net.fr/images/icones-celebres/christ/Christ_Andrei_Rublev_1408.jpg
......
p42
La condition de la fécondité de l'esprit, c'est
que les idées et leurs combinatoires restent ouvertes, qu'elles ne
se figent pas dans une formulation réductrice ou, pour reprendre
l'image de la nutrition, que le métabolisme de la pensée y trouve
des aliments assimilables.
Dès sa première ligne la Torah met en garde contre
la prétention de l'esprit à rendre un compte exhaustif de la réalité
et à vouloir enfermer la Création dans le langage ou le concept ;
contre la prétention de l'idée à être parfaitement et définitivement
adéquate à la chose. La pensée biblique réfute en cela les
prétentions du logos grec et avec André Neher, il est permis de voir
en elle une sorte « d'anti-philosophie ».
« Béréshit barha Elohim» : « Au
commencement Dieu créa. »
On sait l'importance symbolique que la tradition
juive attache au fait que le verset initial de la Genèse ne commence
pas par la première lettre de l'alphabet mais par la seconde qui est
le beth. La succession alphabétique symbolisant la Création
tout entière, le texte exprime ainsi qu'aucune parole - fût-elle
tirée du plus inspiré des livres - ne saurait l'exprimer pleinement
; que ni les mots des hommes, ni leurs concepts, ni leurs systèmes
de pensée ne pourront jamais rendre compte d'une vérité qui, dans sa
plénitude, restera toujours hors de portée de leur esprit. Et le
lecteur de la Torah est ainsi averti qu'il devra chercher la vérité,
non seulement à l'intérieur des textes, mais surtout à leur marge ;
ou, pour reprendre une expression de Marc-Alain Ouaknin, « au-delà
de leurs versets ».
C'est pour cette raison que chez les adeptes du
Talmud la lecture ne consiste pas à saisir un sens univoque que le
texte contiendrait, mais à y susciter le surgissement d'une
pluralité de significations possibles. La Torah exprime la vérité,
mais le discours qui la porte n'est pas de l'ordre de la simple
affirmation. 1l se présente plutôt comme un questionnement incessant
où les réponses devraient être autant d'ouvertures sur de nouveaux
questionnements. Cela fait, dit-on, de la pensée biblique une «
pensée du peut-être » qui oblige l'esprit à rester toujours
accueillant à de nouvelles mutations des idées ; et à éviter à tout
prix l'enfermement de ces idées dans des mots ou des idéologies.
Singulière conception de la pensée qui rappelle cette belle formule
du philosophe Alain : « Une idée, même vraie devient fausse à partir
du moment où on s'en contente. »
On sait l'usage curieux que les sages d'Israël
font des mots : l'attention qu'ils portent à leur « valeur
numérique", à leurs flexions, aux analogies qu'ils présentent les
uns avec les autres. Ils y voient des indices trahissant la présence
d'autres niveaux de sens à révéler au-delà de la signification
explicite de l'écrit. Cela donne au texte un caractère un peu
instable qui tait penser à une matière fluctuante. Elle a fait dire
à Ouaknin que la langue de la Bible n'est pas une langue de mots
mais une « langue de lettres » ; entendant par là que la parole n'y
est pas figée et qu'au prix de légères modifications de leur
combinatoire, les lettres peuvent toujours en infléchir ou en
changer la forme pour en faire jaillir des contenus inédits.
*
* *
Si
la vérité est toujours au-delà de ce que l'homme peut en dire,
c'est dans le processus génésique des choses qu'il convient de la
chercher et non dans un concept que l'on parviendrait à faire
parfaitement coïncider avec elles. Pareille affirmation n'a rien à
voir avec un relativisme qui ruinerait l'idée même de vérité. Elle
appelle simplement un autre geste mental de connaissance. Avec la
Bible, on ne nie pas que la vérité existe bel et bien,
indépendamment de l'esprit qui la pense, mais on la voit prise dans
le mouvement incessant de la Création, ce qui interdit de la figer ;
de sorte que pour connaître les choses sans les amputer d'une part
essentielle d'elles-mêmes, l'homme ne peut faire autrement que de
configurer sa propre pensée au flux divin qui les crée.
Ainsi en est-il de la valeur morale de nos
actions. Elle ne tient pas à leur conformité à une norme de
comportement, mais à la justesse de l'élan qui les inspire et leur
fait actualiser cette norme. C'est de l'amour seul que procèdent
toutes les vérités de la morale et ce n'est pas à l'exactitude mais
à l'amour avec lequel nous accomplissons la loi que nous serons
jugés. Rien n'est étranger à l'Évangile comme une Loi dont il
suffirait d'appliquer les préceptes ; et à la Bible comme ces
concepts que la philosophie grecque essaie de faire coïncider avec
la réalité. À l'instar de la tradition chinoise, elle ne sépare pas
la pensée d'une vie qui change sans cesse ; mais à sa différence,
elle ne fait pas consister la connaissance en une simple mise au
diapason de l'esprit et du monde ; parce que dans sa perspective, le
monde n'est pas seulement en état de « mutation », mais impliqué
dans une genèse continue. Si elle pose implicitement l'incapacité
des choses et des idées à se correspondre parfaitement, ce n'est pas
parce que le monde est indéterminé et impermanent, mais parce qu'il
reste « à venir » ; ce qui est bien différent.
L'insuffisance que la Bible dénonce dans la parole
humaine tient au fait que l'univers jaillit en permanence du néant
comme une nouveauté radicale. Et cette relation singulière qui
structure la connaissance, induit une gestuelle mentale différente
de celles qui animent aussi bien la pensée du Chinois que celle du
Grec ; une gestuelle qui ne produit l'idée ni par mise au diapason,
ni par détermination, mais qui l'accueille plutôt, comme en une
épiphanie.
*
* *
p46
Le rejet d'un enfermement conceptuel qui
risquerait d'obérer le processus de la création ne concerne pas
seulement la connaissance que l'homme a du monde ; il affecte aussi
l'idée qu'il se fait de sa propre existence, de son statut
ontologique. Car l'opération mentale qu'il applique à la
connaissance des choses lui sert également à se connaître lui-même.
Le fait que l'univers dont l'homme se sent faire
partie procède d'une ontogenèse incessante et qu'il soit lui-même le
lieu où elle doit s'accomplir, est déterminant sur le plan de
l'anthropologie. Contrairement aux disciples d'un Platon, un homme
élevé dans une pareille vision de lui même et du monde ne saurait se
chercher dans un archétype qui participerait de la perfection d'un
univers achevé ; ni non plus se vivre, à la façon des sages chinois,
comme le reflet du Grand Tout et de ses mutations incessantes. Pour
ménager la liberté de ses créatures, le Dieu de la Bible laisse sa
Création à l'état de chantier et cela entraîne pour l'homme deux
conséquences majeures : d'abord qu'aucune pensée humaine ne pourra
jamais rendre de lui un compte définitif ; ensuite qu'il ne saurait
- sauf à obtenir le secours de Dieu - se mettre en parfaite
adéquation avec lui-même. Tirant sa vie d'un inépuisable courant de
fécondité, le fils d'Adam doit laisser advenir les infinies
potentialités qu'il porte en lui , comme un texte doit laisser
surgir les multiples sens qu'il recèle. C'est là la condition pour
qu'il puisse dépasser les conditionnements de son espèce et trouver
une raison d'être au-delà d'une vie qui ne trouve pas sa plénitude
dans un quelconque état naturel.
Pour qu'il ait part à sa divinité, Yahvé a donc
voulu faire de l'homme ce point sublime où Sa Création resta
inachevée. Il a ainsi accordé au fils d'Adam une sorte de liberté
ontologique qui lui donne pour vocation, non de réaliser un modèle
humain préfabriqué et idéal, mais de participer à sa propre création
; le condamnant du même coup à être une sorte de béance ontologique
et à se chercher dans l'imperfection même de sa nature. On touche
ici à la grande originalité de la Bible qui est son indifférence
vis-à-vis des schémas abstraits et des perfections idéales. La
pensée hébraïque est en effet une pensée qui - comme André Neher et
Claude Tresmontant l'ont bien montré - « poursuit l'universel à
travers le singulier » et ne sépare jamais ni l'accident de
l'essence, ni la matière clé l'esprit. Rien ne lui est plus étranger
que cette vision platonicienne d'un monde des idées où résiderait la
vérité immuable des choses ; que cette conception désincarnée de
l'Homme avec un grand « H » auquel, pour atteindre à la perfection,
l'homme réel n'aurait qu'à se configurer. L'homme de la Bible est
inconcevable sans ses misères et sans ses limites, parce que sa
perfection ne s'atteint pas, comme le rêvaient les stoïciens et
comme le voudraient les disciples du Bouddha, par l'effacement de
ces limites ou par l'occultation de ces misères, mais, au contraire,
grâce à elles ; en les assumant et en les dépassant, afin de leur
conférer le sens qui leur fait défaut. Ce qui domine chez un tel
homme, c'est le sentiment que la vie se crée en lui. Il la ressent
de tout son être, avec son esprit qui pense en images si concrètes
et avec sa chair où son esprit s'accomplit. Plutôt qu'un être, la
vie que Dieu lui donne en permanence fait de cet homme-là un
incessant surgissement d'être.
En prenant l'exemple de la peinture, nous avons vu
que la pensée chinoise installait le sujet dans une
........
p47
III La pensée comme épiphanie .... p125
......
IV L'entretien avec Nicodème ....p135
.....
p138
....
L'urgence pour Jésus n'est pas d'apporter aux
questions des hommes des réponses qui s'inscriraient dans la
problématique qui est la leur. Il se garde bien de réfléchir
selon leurs normes et de prendre part à leurs débats d'idées. Ce
qu'il veut c'est leur révéler une faculté de leur esprit
qu'ils ignorent ; et s'il ajoute à l'adresse de Nicodème «
Ne t'étonne pas si je t'ai dit il faut naître de nouveau »,
c'est bien pour l'avertir que ce qu'il veut lui faire découvrir
est totalement étranger à ses habitudes de pensée et suppose
chez lui une véritable transformation de la vie mentale.
Ce « penseur » doit comprendre que son esprit
n'est pas une machine à prendre possession du monde et à
contrôler les idées et que pour accueillir la vérité l'homme
doit toujours peu ou prou se dessaisir de ses certitudes ; chose
bien difficile à admettre pour un intellectuel qui ramène si
facilement la réalité aux dimensions de son esprit et ne se
résout pas volontiers à mettre en cause les théories qu'il a
laborieusement forgées. À l'instar de leur premier ancêtre, les
fils d'Adam font spontanément de la pensée et du langage des
outils de domination ; aussi sont ils crispés sur un savoir qui
les rend sourds à ce qui ne vient pas d'eux.
Nous
parlons de ce que nous connaissons, nous témoignons de ce que nous
avons vu, mais vous ne recevez pas notre témoignage (jean 3, 11)
.........
V La révélation du féminin .....p153
164 à 166
A ce progrès des Lumières qui
est un peu celui de l’absolutisme masculin, nous en préférerons un
autre qui va dans le sens opposé et fait de la révélation du féminin
enjeu essentiel de l'histoire humaine. Il commence avec la création
d'Eve et s'accomplit, dans le récit de l'Apocalypse de Jean, avec
cette femme vêtue de soleil qui écrase sous son pied la tête du
serpent ; de ce même serpent tentateur dont la ruse avait consisté à
rendre stérile esprit de nos premiers parents en les attirant dans
une logique du bien et du mal et en les enfermant ainsi dans une
pensée réductrice qui les priva pour longtemps de leur aptitude à
créer et à se créer.
La naïve déclaration
d'amour que Ish fait à Isha est le véritable point de départ de la
grande aventure de l'espèce humaine ; aventure au cours de laquelle
l'homme devra se construire en découvrant progressivement cette
mystérieuse part féminine qui vient accomplir en lui le projet de la
Création. Car non seulement la femme est ce qui résout la
carence ontologique de l'être humain, non seulement elle est ce qui
donne chair et sens au verbe abstrait de l'homme, mais elle est
aussi l'enjeu d'une histoire dont la Bible nous annonce dès la
Genèse qu'elle sera le théâtre d'une lutte sans merci entre sa
descendance à elle et celle du serpent ; d'un combat multiforme dont
l'enjeu véritable sera la possibilité même de ce mariage intime qui
rend la pensée féconde et libre et rendra de l'homme « créateur de
lui-même ».
Tel est le défi que l'être
humain doit relever ; et il est d'autant plus urgent qu'il le relève
que la société moderne rend chaque jour plus pesants les mécanismes
qui régulent ses comportements et formatent sa pensée ; d'autant
plus urgent que, sous prétexte d'égalité des sexes, elle se livre —
significativement — à une gigantesque entreprise d'intoxication
idéologique qui vise à imposer le masculin comme seul modèle
acceptable de l'expérience humaine. La femme revendique ajuste titre
l'égalité des droits, mais si elle le fait seulement en copiant les
manières de son compagnon — en s'habillant comme lui et en exerçant
les métiers qui lui étaient traditionnellement réservés — elle
risque de renoncer à elle-même et de se laisser s'imposer une
civilisation où le féminin n'aura plus sa place ; un monde où Isha
ne pourra plus être que le reflet de Ish.
S'ils veulent cette liberté
créative qui fera d'eux des « êtres sources », s'ils veulent que
leur vie échappe à la tyrannie du logos réducteur et à ses
idéologies meurtrières, il est urgent que l'homme- et la femme
retrouvent ensemble la vraie dimension de ce mariage qui est le
modèle de leur vie spirituelle, en s'initiant à une pensée qui a la
fécondité pour paradigme.
........ fin

Citations relevées dans le livre
"
Dieu créa l'homme le moins possible " A. Blanc de
Saint-Bonnet ...en excergue
" Une idée,
même vraie devient fausse à partir du moment où on s'en contente"
Alain ...p43
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