Un Chemin de Croix « eucharistique »
CITE DU VATICAN, Jeudi 24 mars 2005 (ZENIT.org) – Le site Internet du
Vatican publie aujourd’hui les méditations et les prières composées par le
cardinal Joseph Ratzinger : nous les reprenons ci-dessous. Les autres
prières sont publiées à la même adresse :
www.vatican.va
CHEMIN DE CROIX AU COLISÉE VENDREDI SAINT 2005 MÉDITATIONS ET PRIÈRES
DU CARDINAL
JOSEPH RATZINGER
PRÉSENTATION
Le leitmotiv de ce Chemin de croix est mis en lumière dès le début,
dans la prière initiale, et de nouveau à la quatorzième station. C’est la
parole prononcée par le Christ le Dimanche des Rameaux, par laquelle –
immédiatement après son entrée à Jérusalem – il répond à la question de
quelques Grecs qui voulaient le voir : «Si le grain de blé tombé en terre
ne meurt pas, il reste seul; mais s’il meurt, il donne beaucoup de fruit»
(Jn 12, 24). Le Seigneur interprète ainsi tout son parcours terrestre
comme le parcours du grain de blé qui parvient à porter du fruit seulement
à travers la mort. Il interprète sa vie terrestre, sa mort et sa
résurrection dans la perspective de l’Eucharistie, dans laquelle est
résumé tout son mystère. Puisqu’il a vécu sa mort comme une offrande de
lui-même, comme un acte d’amour, son corps a été transformé dans la
nouvelle vie de la résurrection. Voilà pourquoi, lui, le Verbe incarné,
est désormais devenu pour nous une nourriture qui conduit à la vraie vie,
à la vie éternelle. Le Verbe éternel – la force créatrice de la vie – est
descendu du ciel, devenant ainsi la vraie manne, le pain qui se communique
à l’homme, dans la foi et dans le sacrement. De cette manière, le Chemin
de croix devient un chemin qui conduit jusqu’au coeur du mystère
eucharistique : la piété populaire et la piété sacramentelle de l’Église
se lient et se fondent. La prière du Chemin de Croix peut se comprendre
comme un chemin qui conduit à la communion spirituelle profonde avec
Jésus, sans laquelle la communion sacramentelle resterait vide. Le Chemin
de croix apparaît comme un chemin «mystagogique».
À cette vision s’oppose une compréhension purement sentimentale du
Chemin de croix, risque dont le Seigneur avertit les femmes de Jérusalem
qui pleurent sur lui (cf. huitième station). Le simple sentiment ne suffit
pas; le Chemin de croix doit être une école de foi, de la foi qui, de par
sa nature, «agit par la charité» (Ga 5, 6). Cependant, cela ne signifie
pas que le sentiment doit être exclu. Pour les Pères, le premier défaut
des païens est leur manque de coeur; aussi reprennent-ils la vision
d’Ézéchiel, qui communique au peuple d’Israël la promesse que Dieu fait
d’enlever de leur poitrine le coeur de pierre et de leur donner un coeur
de chair (cf. Ez 11, 19). Le Chemin de croix nous montre un Dieu qui
partage lui-même les souffrances des hommes, dont l’amour ne demeure pas
impassible et distant, un Dieu qui descend parmi nous, jusqu’à la mort sur
la croix (cf. Ph 2, 8). Le Dieu qui partage nos souffrances, le Dieu fait
homme pour porter notre croix, veut transformer notre coeur de pierre et
nous appeler à partager les souffrances d’autrui. Il veut nous donner un
«coeur de chair» qui ne reste pas impassible devant les souffrances
d’autrui. Il se laisse au contraire toucher et nous conduit à l’amour qui
guérit et qui vient en aide. Cela nous renvoie aux paroles de Jésus sur le
grain de blé par lesquelles il transforme la formule fondamentale de
l’existence chrétienne : «Celui qui aime sa vie la perd; celui qui s’en
détache en ce monde la garde pour la vie éternelle» (Jn 12, 25; cf. Mt 16,
25; Mc 8, 35; Lc 9, 24; 17, 33 : «Qui cherchera à conserver sa vie la
perdra. Et qui la perdra la sauvegardera»). Cela nous explique aussi ce
que signifie la phrase qui précède ces paroles centrales de son message
dans les Évangiles synoptiques: «Si quelqu’un veut marcher derrière moi,
qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix, et qu’il me suive» (Mt
16, 24). Par ces mots, il offre lui-même l’interprétation du «Chemin de
croix», il nous enseigne comment nous devons le prier et le suivre : le
Chemin de croix est le chemin du reniement de soi, c’est-à-dire le chemin
de l’amour véritable. Sur ce chemin il nous a précédés; c’est ce chemin
que veut nous enseigner la prière du Chemin de croix. Et cela nous ramène
encore au grain de blé qui doit mourir, à l’Eucharistie, dans laquelle se
rend continuellement présent au milieu de nous le fruit de la mort et de
la résurrection de Jésus. En elle, il marche avec nous, comme autrefois
avec les disciples d’Emmaüs, se faisant toujours de nouveau notre
contemporain.
PRIÈRE INITIALE
Seigneur Jésus Christ, pour nous tu as accepté de devenir comme le
grain de blé qui tombe en terre et qui meurt pour donner beaucoup de fruit
(cf. Jn 12, 24). Tu nous invites à te suivre sur ce chemin quand tu dis :
«Celui qui aime sa vie la perd; celui qui s’en détache en ce monde la
garde pour la vie éternelle» (Jn 12, 25). Nous, cependant, nous sommes
attachés à notre vie. Nous ne voulons pas l’abandonner, mais la garder
totalement pour nous-mêmes. Nous voulons la posséder, non l’offrir. Mais
tu nous précèdes et tu nous montres que c’est seulement en donnant notre
vie que nous pouvons la sauver. Alors que nous t’accompagnons sur le
Chemin de croix, tu veux nous conduire à prendre le chemin du grain de
blé, le chemin d’une fécondité qui parvient jusqu’à l’éternité. La croix –
l’offrande de nous-mêmes – nous pèse beaucoup. Mais sur ton Chemin de
croix tu as porté aussi ma croix, et tu ne l’as pas portée en un
quelconque moment du passé, car ton amour est contemporain à mon
existence. Tu la portes aujourd’hui avec moi et pour moi, et, de manière
admirable, tu veux que moi aussi, aujourd’hui, comme jadis Simon de
Cyrène, je porte avec toi ta croix et, t’accompagnant, je me mette avec
toi au service de la rédemption du monde. Aide-moi, afin que mon Chemin de
croix ne soit pas simplement le pieux sentiment d’un instant. Aide-nous
non seulement à t’accompagner par de nobles pensées, mais à marcher sur
ton chemin avec le coeur, plus encore avec les pas concrets de notre vie
quotidienne. Aide-nous pour que nous marchions avec tout nous-mêmes sur le
Chemin de croix, et que nous demeurions à jamais sur ton chemin.
Libère-nous de la peur de la croix, de la peur face à la dérision des
autres, de la peur que notre vie puisse nous échapper si nous ne
saisissons pas tout ce qu’elle offre. Aide-nous à démasquer les tentations
qui nous promettent la vie, mais dont les conséquences nous laissent, en
fin de compte, sans but et déçus. Aide-nous à ne pas nous faire les
maîtres de la vie, mais à la donner. En t’accompagnant sur le chemin du
grain de blé, aide-nous à trouver, «en perdant notre vie», le chemin de
l’amour, le chemin qui nous procure véritablement la vie, la vie en
abondance (cf. Jn 10, 10).
1ère Station : Jésus est condamné à mort
De l’Évangile selon saint Matthieu 27, 22-23.26
MÉDITATION
Le Juge du monde, qui reviendra un jour pour nous juger, est là,
anéanti, déshonoré et sans défense face au juge de la terre. Pilate n’est
pas totalement mauvais. Il sait que ce condamné est innocent; il cherche
le moyen de le libérer. Mais Pilate est indécis. Et en définitive, sur le
droit, il fait prévaloir sa position, il se fait prévaloir lui-même. Et
les hommes qui vocifèrent et demandent la mort de Jésus ne sont pas non
plus totalement mauvais. Beaucoup parmi eux, le jour de la Pentecôte,
seront «remués jusqu’au fond d’eux-mêmes» (Ac 2, 37), quand Pierre leur
dira : «Jésus de Nazareth – cet homme dont Dieu avait fait connaître la
mission – ... vous l’avez fait mourir en le faisant clouer à la croix par
la main des païens...» (Ac 2, 22s). Mais en cet instant, ils subissent
l’influence de la foule. Ils vocifèrent parce que les autres vocifèrent,
et ils vocifèrent comme les autres. Et ainsi, la justice est piétinée par
lâcheté, par faiblesse, par peur du diktat de la mentalité dominante. La
voix ténue de la conscience est étouffée par les vociférations de la
foule. L’indécision, le respect humain confèrent leur force au mal.
PRIÈRE
Seigneur, tu as été condamné à mort car la peur du regard des autres a
étouffé la voix de la conscience. Tout au long de l’histoire, il en a
toujours été ainsi, des innocents ont été maltraités, condamnés et tués.
Combien de fois n’avons-nous pas, nous aussi, préféré le succès à la
vérité, notre réputation à la justice ! Donne force, dans notre vie, à la
voix ténue de la conscience, à ta voix. Regarde-moi comme tu as regardé
Pierre après le reniement. Fais en sorte que ton regard pénètre nos âmes
et indique à notre vie la direction. A ceux qui ont vociféré contre toi le
Vendredi saint, tu as donné l’émotion du cœur et la conversion au jour de
la Pentecôte. Et ainsi, tu nous as donné à tous l’espérance. Donne-nous
aussi, toujours de nouveau, la grâce de la conversion.
2e Station : Jésus est chargé de la Croix
De l’Évangile selon saint Matthieu 27, 27-31
MÉDITATION
Jésus, condamné comme prétendu roi, tu es raillé, mais dans la dérision
apparaît cruellement la vérité. Combien de fois les insignes du pouvoir
portés par les puissants de ce monde ne sont-ils pas une insulte à la
vérité, à la justice et à la dignité de l’homme! Combien de fois leurs
cérémonies et leurs grands discours ne sont en vérité rien d’autre que de
pompeux mensonges, une caricature de la tâche qui est la leur: se mettre
au service du bien ! Jésus, celui dont on se moque et qui porte la
couronne de la souffrance, est pour cela précisément le vrai roi. Son
sceptre est justice (cf. Ps 45, 7). Le prix de la justice est souffrance
en ce monde : lui, le vrai roi, ne règne pas par la violence, mais par
l’amour dont il souffre pour nous et avec nous. Il porte la croix sur lui,
notre croix, le poids de l’homme, le poids du monde. C’est ainsi qu’il
nous précède et qu’il nous montre comment trouver le chemin de la vraie
vie.
PRIÈRE
Seigneur, tu t’es laissé tourner en dérision et outrager. Aide-nous à
ne pas nous joindre à ceux qui se moquent de celui qui souffre et de celui
qui est faible. Aide-nous à reconnaître ton visage en ceux qui sont
humiliés et mis à l’écart. Aide-nous à ne pas nous décourager devant les
moqueries du monde, quand l’obéissance à ta volonté est tournée en
dérision. Tu as porté la croix et tu nous as invités à te suivre sur ce
chemin (cf. Mt 10, 38). Aide-nous à accepter la croix, à ne pas la fuir, à
ne pas nous lamenter et à ne pas laisser nos cœurs être abattus devant les
peines de la vie. Aide-nous à parcourir le chemin de l’amour et, obéissant
à ses exigences, à atteindre la vraie joie.
3e Station : Jésus tombe pour la première fois
Du livre du prophète Isaïe 53, 4-6
MÉDITATION
L’homme est tombé et tombe toujours de nouveau : combien de fois
n’est-il que la caricature de lui-même, et non plus l’image de Dieu,
tournant ainsi en dérision le Créateur? N’est-il pas l’image de l’homme
par excellence celui qui, descendant de Jérusalem à Jéricho, fut attaqué
par les brigands qui le dépouillèrent et le laissèrent à moitié mort,
ensanglanté au bord du chemin ! La chute de Jésus sous la croix n’est pas
seulement la chute de l’homme Jésus déjà épuisé par la flagellation. Ici
apparaît quelque chose de plus profond, comme dit Paul dans la lettre aux
Philippiens : «Lui qui était dans la condition de Dieu, il n’a pas jugé
bon de revendiquer son droit d’être traité à l’égal de Dieu ; mais au
contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur.
Devenu semblable aux hommes ... il s’est abaissé lui-même en devenant
obéissant jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix» (Ph 2, 6-8). Dans la
chute de Jésus sous le poids de la croix, apparaît tout son parcours : son
abaissement volontaire pour ôter notre orgueil. Et en même temps apparaît
la nature de notre orgueil: l’arrogance avec laquelle nous voulons nous
émanciper de Dieu et n’être rien d’autre que nous-mêmes, l’arrogance avec
laquelle nous croyons ne pas avoir besoin de l’amour éternel, mais avec
laquelle nous voulons maîtriser notre vie tout seuls. Dans cette rébellion
contre la vérité, dans cette tentative d’être nous-mêmes des dieux, d’être
créateurs et juges de nous-mêmes, nous tombons et nous finissons par nous
détruire nous-mêmes. L’abaissement de Jésus est le dépassement de notre
orgueil: par son abaissement, il nous relève. Laissons-le nous relever.
Dépouillons-nous de notre autosuffisance, de notre envie erronée
d’autonomie et, au contraire, apprenons de lui, de lui qui s’est abaissé,
à trouver notre véritable grandeur, en nous abaissant et en nous tournant
vers Dieu et vers nos frères humiliés.
PRIÈRE
Seigneur Jésus, le poids de la croix t’a fait tomber à terre. Le poids
de notre péché, le poids de notre orgueil t’a terrassé. Mais ta chute
n’est pas le signe d’un destin hostile, elle n’est pas la pure et simple
faiblesse de celui qui est outragé. Tu as voulu venir à nous, nous qui, en
raison de notre orgueil, gisons à terre. L’orgueil qui nous fait penser
que nous avons la capacité de produire l’homme a contribué à ce que les
hommes soient devenus une sorte de marchandise, pouvant s’acheter et se
vendre, tel un réservoir de matériaux pour nos expérimentations, grâce
auxquelles nous espérons vaincre la mort par nous-mêmes, alors qu’en
vérité, nous ne faisons rien d’autre qu’humilier toujours plus
profondément la dignité de l’homme. Seigneur, aide-nous parce que nous
sommes tombés. Aide-nous à abandonner notre orgueil destructeur, en
apprenant, par ton humilité, à nous relever de nouveau.
4e Station : Jésus rencontre sa Mère
De l’Évangile selon saint Luc. 2, 34-35.51
MÉDITATION
Sur le chemin de croix de Jésus, se trouve aussi Marie, sa Mère. Durant
la vie publique de son fils, elle avait dû se tenir à l’écart, pour faire
place à la nouvelle famille de Jésus, à la famille naissante de ses
disciples. Elle avait également dû entendre ses paroles: «Qui est ma mère
et qui sont mes frères? ... Celui qui fait la volonté de mon Père qui est
aux cieux, celui-là est pour moi un frère, une sœur et une mère.» (Mt 12,
48-50). On voit à présent qu’elle est la Mère de Jésus, non seulement dans
son corps, mais dans son cœur. Avant même de l’avoir conçu dans son corps,
elle l’avait conçu dans son cœur, grâce à son obéissance. Il lui avait été
dit: «Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils... Il sera grand...;
le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père» (Lc 1, 31s).
Pourtant, peu après, elle avait entendu de la bouche du vieux Syméon
d’autres mots: «Et toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée» (Lc 2,
35). Elle se sera ainsi rappelée les paroles des prophètes, des paroles
semblables à celles-ci: « Maltraité, il s’humilie, il n’ouvre pas la
bouche: comme un agneau conduit à l’abattoir» (Is 53, 7). A présent tout
devenait réalité. Dans son coeur, elle avait toujours conservé la parole
que l’ange lui avait dite quand tout avait commencé: «Sois sans crainte,
Marie» (Lc 1, 30). Les disciples se sont enfuis, elle, non. Elle reste là,
avec son courage de mère, avec sa fidélité de mère, avec sa bonté de mère
et avec sa foi, qui résiste dans l’obscurité: «Heureuse celle qui a cru» (Lc
1, 45). «Mais le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi
sur terre?» (Lc 18, 8). Oui, à ce moment-là, Il le sait: il trouvera la
foi. En cette heure-là, c’est sa grande consolation.
PRIÈRE
Sainte Marie, Mère du Seigneur, tu es restée fidèle quand les disciples
se sont enfuis. De même que tu as cru quand l’ange t’a annoncé
l’incroyable – que tu allais devenir la mère du Très-Haut –, de même, tu
as cru à l’heure de sa plus grande humiliation. Ainsi, à l’heure de la
croix, à l’heure de la nuit la plus sombre du monde, tu es devenue Mère
des croyants, Mère de l’Église. Nous te prions: apprends-nous à croire et
aide-nous afin que notre foi devienne courage de servir et geste d’un
amour qui vient en aide et qui sait partager la souffrance.
5e Station : Jésus est aidé par le Cyrénéen à porter sa croix
De l’Évangile selon saint Matthieu 27, 32; 16, 24
MÉDITATION
Simon de Cyrène rentre du travail, il est sur le chemin du retour chez
lui, quand il croise ce triste cortège de condamnés –, spectacle sans
doute habituel pour lui. Les soldats usent de leur droit de cœrcition et
mettent la croix sur lui, robuste homme de la campagne. Quelle gêne a-t-il
dû éprouver en se trouvant soudain mêlé au destin de ces condamnés! Il
fait ce qu’il doit faire, avec certainement beaucoup de répugnance.
Toutefois, l’évangéliste Marc nomme également ses fils qui étaient connus
pour être chrétiens et membres de la communauté (Mc 15, 21). De cette
rencontre involontaire est née la foi. En accompagnant Jésus et en
partageant le poids de sa croix, le Cyrénéen a compris que marcher avec ce
Crucifié et l’assister était une grâce. Le mystère de Jésus souffrant et
muet a touché son cœur. Jésus, dont seul l’amour divin pouvait et peut
racheter l’humanité entière, veut que nous partagions sa croix, pour
compléter ce qui manque encore à ses souffrances (Col 1, 24). Chaque fois
qu’avec bonté nous allons à la rencontre de celui qui souffre, de celui
qui est persécuté et faible, en partageant sa souffrance, nous aidons
Jésus à porter sa propre croix. Ainsi nous obtenons le salut et nous
pouvons nous-mêmes coopérer au salut du monde.
PRIÈRE
Seigneur, tu as ouvert les yeux et le cœur de Simon de Cyrène, lui
donnant, par le partage de ta croix, la grâce de la foi. Aide-nous à venir
en aide à notre prochain qui souffre, même si cet appel est contraire à
nos projets et à nos penchants. Donne-nous de reconnaître que partager la
croix des autres, et faire l’expérience qu’ainsi nous marchons avec toi,
est une grâce. Donne-nous de reconnaître avec joie que c’est précisément
en partageant ta souffrance et les souffrances de ce monde que nous
devenons serviteurs du salut, et qu’ainsi nous pouvons contribuer à
construire ton corps, l’Église.
6e Station : Véronique essuie le visage de Jésus
Du livre du prophète Isaïe 53, 2-3
Du livre des Psaumes 26 [27], 8-9
MÉDITATION
«C’est ta face, Seigneur, que je cherche: ne me cache pas ta face» (Ps
26 [27], 8-9). Véronique – Bérénice, selon la tradition grecque – incarne
cette aspiration qui est commune à tous les hommes pieux de l’Ancien
Testament, cette aspiration de tous les croyants à voir le visage de Dieu.
Sur le chemin de croix de Jésus, au début, elle ne rend d’abord qu’un
service de bonté féminine: elle offre un linge à Jésus. Elle ne se laisse
ni gagner par la brutalité des soldats, ni immobiliser par la peur des
disciples. Elle est l’image de la femme éprise de bonté qui, dans le
désarroi et l’obscurité des cœurs, garde le courage de la bonté, et ne
permet pas que son cœur s’obscurcisse. «Heureux les cœurs purs – avait dit
le Seigneur dans le Discours sur la montagne –, ils verront Dieu!» (Mt
5,8). Au début, Véronique voit seulement un visage maltraité et marqué par
la souffrance. Mais l’acte d’amour imprime dans son cœur la véritable
image de Jésus: sur son visage humain, couvert de sang et de blessures,
elle voit le visage de Dieu et de sa bonté, qui nous accompagne aussi dans
la souffrance la plus profonde. C’est seulement avec le cœur que nous
pouvons voir Jésus. Seul l’amour nous rend capables de voir et nous rend
purs. Seul l’amour nous fait reconnaître Dieu, qui est l’amour même.
PRIÈRE
Seigneur, donne-nous l’inquiétude du cœur qui cherche ton visage.
Protège-nous de l’obscurcissement du cœur qui ne voit que l’apparence des
choses. Donne-nous la sincérité et la pureté qui nous rendent capables de
voir ta présence dans le monde. Quand nous n’avons pas la capacité de
faire de grandes choses, donne-nous le courage d’une humble bonté. Imprime
ton visage dans nos cœurs, afin que nous puissions te rencontrer et
montrer au monde ton image.
7e Station : Jésus tombe pour la deuxième fois
Du livre des Lamentations 3, 1-2.9.16
MÉDITATION
La tradition de la triple chute de Jésus et du poids de la croix
rappelle la chute d’Adam – le fait que nous soyons des êtres humains
déchus – et le mystère de la participation de Jésus à notre chute. Au
cours de l’histoire, la chute de l’homme prend des formes toujours
nouvelles. Dans sa première Lettre, saint Jean parle d’une triple chute de
l’homme: les désirs de la chair, les désirs des yeux et l’orgueil de la
richesse. C’est ainsi que, sur l’arrière-fond des vices de son temps, avec
tous ses excès et toutes ses perversions, il interprète la chute de
l’homme et de l’humanité. Cependant nous pouvons penser aussi, dans
l’histoire plus récente, que les chrétiens, en se détournant de la foi,
ont abandonné le Seigneur: les grandes idéologies, comme la banalisation
de l’homme qui ne croit plus à rien et qui se laisse simplement aller, ont
construit un nouveau paganisme, un paganisme plus mauvais, qui, en voulant
mettre définitivement Dieu à part, a fini par se débarrasser de l’homme.
L’homme gît ainsi dans la cendre. Le Seigneur porte ce poids, il tombe et
il tombe, pour pouvoir venir jusqu’à nous; il nous regarde afin que notre
cœur se réveille; il tombe pour nous relever.
PRIÈRE
Seigneur Jésus Christ, tu as porté notre poids et tu continues à nous
porter. C’est notre poids qui te fait tomber. Mais que ce soit toi qui
nous relèves, car seuls nous n’arrivons pas à nous lever de la cendre !
Libère-nous de la puissance de la concupiscence. A la place d’un cœur de
pierre, donne-nous à nouveau un cœur de chair, un cœur capable de voir.
Détruis le pouvoir des idéologies, afin que les hommes reconnaissent
qu’elles sont tissées de mensonges. Ne permets pas que le mur du
matérialisme devienne insurmontable. Fais-nous percevoir à nouveau ta
présence. Rends-nous sobres et attentifs pour pouvoir résister aux forces
du mal et aide-nous à reconnaître les besoins intérieurs et extérieurs des
autres, à les soutenir. Relève-nous, afin que nous puissions relever les
autres. Donne-nous l’espérance au milieu de toute obscurité, afin que nous
puissions devenir porteurs d’espérance pour le monde.
8e Station : Jésus rencontre les femmes de Jérusalem qui pleurent sur
lui
De l’Évangile selon saint Luc 23,28-31
MÉDITATION
Écouter Jésus alors qu’il fait des reproches aux femmes de Jérusalem
qui le suivent et qui pleurent sur lui nous fait réfléchir. Comment le
comprendre ? Ne s’agit-il pas de reproches adressés à une piété purement
sentimentale, qui ne devient pas conversion et foi vécue ? Il ne sert à
rien de pleurer sur les souffrances de ce monde, avec des paroles et par
des sentiments, alors que notre vie continue toujours égale à elle-même.
C’est pourquoi le Seigneur nous avertit du danger dans lequel nous sommes
nous-mêmes. Il nous montre la gravité du péché et la gravité du jugement.
Malgré tous nos discours effrayés devant le mal et la souffrance des
innocents, ne sommes-nous pas trop enclins à banaliser le mystère du mal ?
En définitive, de l’image de Dieu et de Jésus, nous ne retenons peut-être
que l’aspect doux et aimable, alors que nous avons évacué tranquillement
l’aspect du jugement? Nous nous demandons si Dieu peut encore prendre
notre faiblesse au tragique. Car nous ne sommes que des hommes ! Mais en
regardant les souffrances du Fils, nous voyons toute la gravité du péché,
nous voyons comment il doit être expié jusqu’à la fin pour pouvoir être
vaincu. Le mal ne peut pas continuer à être banalisé devant l’image du
Seigneur qui souffre. A nous aussi, le Seigneur déclare: Ne pleurez pas
sur moi, pleurez sur vous-mêmes ... car si l’on traite ainsi l’arbre vert,
que deviendra l’arbre sec ?
PRIÈRE
Aux femmes qui pleurent, tu as parlé, Seigneur, de la pénitence, du
jour du Jugement, lorsque nous nous trouverons en présence de ta face, la
face du Juge du monde. Tu nous appelles à sortir de la banalisation du mal
dans laquelle nous nous complaisons, de manière à pouvoir continuer notre
vie tranquille. Tu nous montres la gravité de notre responsabilité, le
danger d’être trouvés coupables et stériles au jour du Jugement. Aide-nous
à ne pas nous contenter de marcher à côté de toi, ou d’offrir seulement
des paroles de compassion. Convertis-nous et donne-nous une vie nouvelle;
ne permets pas que, en définitive, nous restions là comme un arbre sec,
mais fais que nous devenions des sarments vivants en toi, la vraie vigne,
et que nous portions du fruit pour la vie éternelle (cf. Jn 15, 1-10).
9e Station : Jésus tombe pour la troisième fois
Du livre des Lamentations. 3,27-32
MÉDITATION
Que peut nous dire la troisième chute de Jésus sous le poids de la
croix ? Peut-être nous fait-elle penser plus généralement à la chute de
l’homme, au fait que beaucoup s’éloignent du Christ, dans une dérive vers
un sécularisme sans Dieu. Mais ne devons-nous pas penser également à ce
que le Christ doit souffrir dans son Église elle-même ? Combien de fois
abusons-nous du Saint-Sacrement de sa présence, dans quel cœur vide et
mauvais entre-t-il souvent ! Combien de fois ne célébrons-nous que
nous-mêmes, et ne prenons-nous même pas conscience de sa présence !
Combien de fois sa Parole est-elle déformée et galvaudée ! Quel manque de
foi dans de très nombreuses théories, combien de paroles creuses ! Que de
souillures dans l’Église, et particulièrement parmi ceux qui, dans le
sacerdoce, devraient lui appartenir totalement ! Combien d’orgueil et
d’autosuffisance ! Que de manques d’attention au sacrement de la
réconciliation, où le Christ nous attend pour nous relever de nos chutes !
Tout cela est présent dans sa passion. La trahison des disciples, la
réception indigne de son Corps et de son Sang sont certainement les plus
grandes souffrances du Rédempteur, celles qui lui transpercent le cœur. Il
ne nous reste plus qu’à lui adresser, du plus profond de notre âme, ce cri
: Kyrie, eleison – Seigneur, sauve-nous (cf. Mt 8, 25).
PRIÈRE
Souvent, Seigneur, ton Église nous semble une barque prête à couler,
une barque qui prend l’eau de toute part. Et dans ton champ, nous voyons
plus d’ivraie que de bon grain. Les vêtements et le visage si sales de ton
Église nous effraient. Mais c’est nous-mêmes qui les salissons ! C’est
nous-mêmes qui te trahissons chaque fois, après toutes nos belles paroles
et nos beaux gestes. Prends pitié de ton Église : en elle aussi, Adam
chute toujours de nouveau. Par notre chute, nous te traînons à terre, et
Satan s’en réjouit, parce qu’il espère que tu ne pourras plus te relever
de cette chute ; il espère que toi, ayant été entraîné dans la chute de
ton Église, tu resteras à terre, vaincu. Mais toi, tu te relèveras. Tu
t’es relevé, tu es ressuscité et tu peux aussi nous relever. Sauve ton
Église et sanctifie-la. Sauve-nous tous et sanctifie-nous.
10e Station : Jésus est dépouillé de ses vêtements
De l’Évangile selon saint Matthieu 27,33.36
MÉDITATION
Jésus est dépouillé de ses vêtements. Le vêtement donne à l’homme sa
position sociale ; il lui donne sa place dans la société, il le fait être
quelqu’un. Être dépouillé en public signifie, pour Jésus, n’être plus
personne, n’être rien d’autre qu’un exclu, méprisé de tous. Le moment du
dépouillement nous rappelle aussi l’exclusion du paradis : la splendeur de
Dieu a disparu en l’homme qui maintenant se trouve là, nu et exposé,
dénudé et honteux. De cette manière, Jésus assume encore une fois la
situation de l’homme pécheur. Ce Jésus dépouillé nous rappelle le fait
que, tous, nous avons perdu notre «premier vêtement», c’est-à-dire la
splendeur de Dieu. Sous la croix les soldats tirent au sort pour se
partager ses pauvres biens, ses vêtements. Les évangélistes en font le
récit avec des paroles du Psaume 22, verset 19 et ils nous disent ainsi ce
que Jésus dira aux disciples d’Emmaüs : tout est arrivé «selon les
Écritures». Ici, rien n’est pure coïncidence, tout ce qui arrive est
contenu dans la Parole de Dieu et voulu par son dessein divin. Le Seigneur
fait l’expérience de toutes les stations et de tous les degrés de la
perdition humaine, et chacun de ces degrés est, avec toute son amertume,
une étape de la Rédemption : c’est ainsi qu’il ramène au bercail la brebis
perdue. Rappelons-nous aussi que Jean déclare que l’objet du tirage au
sort était la tunique de Jésus «tissée tout d’une pièce, de haut en bas»
(19, 23). Nous pouvons y voir une allusion au vêtement du grand prêtre,
qui était «tissé d’une seule pièce», sans couture (Flavius Josèphe, Les
Antiquités juives, III, 161). Lui, le Crucifié, il est en effet le
véritable grand prêtre.
PRIÈRE
Seigneur Jésus, tu as été dépouillé de tes vêtements, exposé au
déshonneur, exclu de la société. Tu t’es chargé du déshonneur d’Adam, et
tu l’as guéri. Tu t’es chargé des souffrances et des besoins des pauvres,
ceux qui sont exclus du monde. Mais c’est ainsi que s’accomplit la parole
des prophètes. C’est ainsi que tu donne sens à ce qui semble privé de
sens. C’est ainsi que tu nous fais reconnaître que ton Père te tient dans
ses mains, comme nous-mêmes et le monde. Donne-nous un profond respect de
l’homme à tous les stades de son existence et dans toutes les situations
ou nous le rencontrons. Donne-nous le vêtement de lumière de ta grâce.
11e Station : Jésus est cloué sur la Croix
De l’Évangile selon saint Matthieu 27,37-42
MÉDITATION
Jésus est cloué sur la croix. Le linceul de Turin nous permet de nous
faire une idée de l’incroyable cruauté de ce procédé. Jésus ne boit pas le
breuvage anesthésiant qu’on lui offre : consciemment, il prend sur lui
toute la souffrance de la crucifixion. Tout son corps est tourmenté; ainsi
les paroles du Psaume se vérifient : «Et moi, je suis un ver, pas un
homme, raillé par les gens, rejeté par le peuple» (Ps 21 [22], 7). «Il
était méprisé ... semblable au lépreux dont on se détourne ... Pourtant
c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était
chargé» (Is 53, 3 s). Arrêtons-nous devant cette image de douleur, devant
le Fils de Dieu souffrant. Regardons vers lui dans les moments où nous
sommes présomptueux et portés à la jouissance, pour apprendre à respecter
les limites et à voir la superficialité de tous les biens purement
matériels. Regardons vers lui dans les moments de calamité et d’angoisse,
pour reconnaître que c’est alors que nous sommes proches de Dieu.
Cherchons à reconnaître son visage dans ceux que nous avons tendance à
mépriser. Devant le Seigneur condamné, qui ne veut pas se servir de son
pouvoir pour descendre de la croix, mais qui supporte plutôt la souffrance
de la croix jusqu’au bout, peut affleurer encore une autre pensée. Ignace
d’Antioche, lui-même enchaîné à cause de sa foi dans le Seigneur, fait
l’éloge des chrétiens de Smyrne pour leur foi inébranlable: ils étaient
comme cloués par la chair et le sang à la croix du Seigneur Jésus Christ
(1, 1). Laissons-nous clouer à lui, en ne cédant à aucune tentation de
nous éloigner et de nous laisser aller aux railleries qui voudraient nous
inciter à le faire.
PRIÈRE
Seigneur Jésus Christ, tu t’es fait clouer sur la croix, acceptant la
terrible cruauté de cette souffrance, la destruction de ton corps et de ta
dignité. Tu t’es fait clouer, tu as souffert sans fuir et sans accepter de
compromis. Aide-nous à ne pas fuir devant ce que nous sommes appelés à
accomplir. Aide-nous à nous laisser lier étroitement à toi. Aide-nous à
démasquer la fausse liberté qui veut nous éloigner de toi. Aide-nous à
accepter ta liberté liée et à trouver, dans ce lien étroit avec toi, la
vraie liberté.
12e Station : Jésus meurt sur la Croix
De l’Évangile selon saint Jean 19, 19-20
De l’Évangile selon saint Matthieu 27, 45-50.54
MÉDITATION
Sur la croix de Jésus, dans les deux langues du monde de cette époque,
le grec et le latin, et dans la langue du peuple élu, l’hébreu, une
inscription exprimant qui il est: le Roi des Juifs, le Fils promis à
David. Pilate, juge injuste, est devenu prophète malgré lui. Devant
l’opinion publique mondiale, la royauté de Jésus est proclamée. Jésus
lui-même n’avait pas accepté le titre de Messie, car il pouvait évoquer
une idée erronée et purement humaine du pouvoir et du salut. Maintenant,
le titre peut être écrit là, publiquement au-dessus du Crucifié. C’est
ainsi qu’il est vraiment le roi du monde. Il est maintenant vraiment
«élevé». Dans sa descente, il est monté. Voici qu’il a radicalement
accompli le commandement de l’amour, il a accompli l’offrande de lui-même,
et c’est ainsi qu’il est la manifestation du Dieu véritable, de ce Dieu
qui est l’amour. Désormais, nous savons qui est Dieu. Désormais, nous
savons en quoi consiste la royauté véritable. Jésus prie avec les paroles
du Psaume 21, qui commence ainsi: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu
abandonné?» (21[22], 2). Il prend sur lui toute la souffrance d’Israël, la
souffrance de l’humanité tout entière, le drame de l’obscurité de Dieu, et
il permet aussi à Dieu de se manifester là ou il semblerait être
définitivement mis en échec et absent. La croix de Jésus est un événement
cosmique. Le monde s’obscurcit, quand le Fils de Dieu subit la mort. La
terre tremble. Et auprès de la croix commence l’Église des païens. Le
Centurion romain reconnaît, il comprend que Jésus est le Fils de Dieu. De
la croix, il triomphe, toujours de nouveau.
PRIÈRE
Seigneur Jésus Christ, à l’heure de ta mort, le soleil s’éclipsa. Sans
cesse, tu es à nouveau cloué sur la croix. En cette heure de l’histoire
précisément, nous vivons dans l’obscurité de Dieu. A cause de l’immense
souffrance et de la méchanceté des hommes, le visage de Dieu, ton visage,
apparaît obscurci, méconnaissable. Mais c’est justement sur la croix que
tu t’es fait reconnaître. Précisément parce que tu es celui qui souffre et
qui aime, tu es celui qui est élevé. C’est de là que tu as triomphé. En
cette heure d’obscurité et de trouble, aide-nous à reconnaître ton visage.
Aide-nous à croire en toi et à te suivre spécialement dans les heures
d’obscurité et de détresse. En cette heure, montre-toi encore au monde.
Fais que ton salut lui soit manifesté.
13e Station : Jésus est descendu de la Croix et remis à sa Mère
De l’Évangile selon saint Matthieu 27, 54-55
MÉDITATION
Jésus est mort, son cœur a été transpercé par la lance du soldat et il
en sortit aussitôt du sang et de l’eau: image mystérieuse du fleuve des
sacrements du Baptême et de l’Eucharistie, par lesquels, à cause du cœur
transpercé du Seigneur, l’Église renaît sans cesse. On ne lui a pas brisé
les jambes, comme aux deux autres crucifiés; ainsi, il se manifeste comme
l’agneau pascal véritable, dont aucun os ne doit être brisé (cf. Ex
12,46). Et maintenant qu’il a tout supporté, malgré tout le trouble qui
agite les cœurs, malgré le pouvoir de la haine et des lâchetés, voici
qu’il n’est pas demeuré seul. Il y a les fidèles. Auprès de la croix, il y
avait aussi Marie, sa Mère, Marie sœur de sa Mère, Marie de Magdala et le
disciple qu’il aimait. Et voici qu’arrive un homme riche, Joseph d’Arimathie:
ce riche trouve le moyen de passer par le trou d’une aiguille, parce que
Dieu lui en donne la grâce. Il ensevelit Jésus dans son tombeau neuf, dans
un jardin: à l’endroit où Jésus est enseveli, le cimetière se transforme
en un jardin, le jardin d’où Adam avait été chassé lorsqu’il s’était
détaché de la plénitude de la vie, lorsqu’il s’était détaché de son
Créateur. Le tombeau dans le jardin nous apprend que le pouvoir de la mort
arrive à son terme. Voici que s’approche aussi un membre du Sanhédrin,
Nicodème; celui à qui Jésus avait annoncé le mystère de la renaissance par
l’eau et l’Esprit. Même au sein du Sanhédrin, qui avait décidé sa mort, il
y a quelqu’un qui croit, quelqu’un qui connaît et qui reconnaît Jésus
après sa mort. Au-delà de l’heure du grand deuil, des ténèbres épaisses et
du désespoir, demeure cependant, mystérieusement, la lumière de
l’espérance. Le Dieu caché est cependant le Dieu vivant et proche. Le
Seigneur mort reste cependant le Seigneur et notre Sauveur, même dans la
nuit de la mort. L’Église de Jésus Christ, sa nouvelle famille, commence à
se former.
PRIÈRE
Seigneur, tu es descendu dans l’obscurité de la mort. Mais ton corps a
été recueilli par de bonnes mains, il a été enveloppé dans un linceul
immaculé (Mt 27, 59). La foi n’est pas complètement morte, le soleil n’est
pas complètement obscurci. Comme il nous semble souvent que tu dors! Et
comme nous pouvons facilement nous éloigner, nous les hommes, et nous dire
à nous-mêmes: Dieu est mort. Permets que, à l’heure de l’obscurité, nous
soyons capables de reconnaître que toi tu es là. Ne nous abandonne pas
quand nous sommes tentés de perdre courage. Aide-nous à ne pas te laisser
seul. Donne-nous une fidélité qui résiste au désarroi et un amour qui
sache t’accueillir dans les moments de détresse extrême, comme le fit ta
Mère, qui te reçut à nouveau entre ses bras. Aide-nous, aide les pauvres
et les riches, les simples et les savants, à regarder au-delà des peurs et
des préjugés. Rend-nous capables de t’offrir nos aptitudes, notre cœur,
notre temps, pour préparer ainsi le jardin où peut advenir la
résurrection.
14e Station : Jésus est mis au tombeau
De l’Évangile selon saint Matthieu 27,59-61
MÉDITATION
Jésus, objet de mépris et d’outrages, est déposé, avec tous les
honneurs, dans un tombeau neuf. Nicodème apporte cent livres d’un mélange
de myrrhe et d’aloès, qui doit répandre un parfum précieux. Voici que dans
l’offrande du Fils se manifeste, comme au moment de l’onction de Béthanie,
une démesure qui nous rappelle l’amour généreux de Dieu, la «surabondance
de son amour». Dieu s’offre généreusement lui-même. Si la mesure de Dieu
est la surabondance, pour nous aussi rien ne devrait être trop, vis-à-vis
de Dieu. C’est ce que Jésus lui-même nous a appris dans le discours sur la
montagne (cf. Mt 5,20). Mais il faut aussi nous souvenir des paroles de
saint Paul sur Dieu qui, «par nous, répand en tous lieux le parfum de sa
connaissance [du Christ]. Car nous sommes bien ... la bonne odeur du
Christ» (2 Co 2, 14s). Au milieu de la décomposition des idéologies, notre
foi devrait être à nouveau le parfum qui nous remet sur le chemin de la
vie. Au moment de la mise au tombeau commence à s’accomplir la parole de
Jésus: «Amen, amen, je vous le dis: si le grain tombé en terre ne meurt
pas, il reste seul; mais s’il meurt, il donne beaucoup de fruit» (Jn
12,24). Jésus est le grain de blé qui meurt. A partir du grain de blé mort
commence la grande multiplication du pain qui dure jusqu’à la fin du
monde: c’est le pain de vie capable de rassasier l’humanité tout entière
et de lui donner la nourriture de manière surabondante: par la croix et la
résurrection, le Verbe éternel de Dieu, qui, pour nous, s’est fait chair
et s’est aussi fait pain. Sur le tombeau de Jésus, resplendit le mystère
de l’Eucharistie.
PRIÈRE
Seigneur Jésus Christ, par ta mise au tombeau, tu as fais tienne la
mort du grain de blé, tu es devenu le grain de blé mort qui donne beaucoup
de fruit tout au long des temps, jusqu’à l’éternité. Du tombeau,
resplendit pour tous les temps la promesse du grain de blé, d’où provient
la manne véritable, le pain de vie par lequel tu t’offres toi-même à nous.
Par l’Incarnation et la mort, la Parole éternelle est devenue la Parole
proche: tu te mets entre nos mains et dans nos cœurs pour que ta Parole
croisse en nous et donne du fruit. Tu te donnes toi-même à travers la mort
du grain de blé, pour que, à notre tour, nous ayons le courage de perdre
notre vie pour la trouver et que, nous aussi, nous ayons confiance en la
promesse du grain de blé. Aide-nous à aimer toujours davantage ton mystère
eucharistique et à le vénérer, à vivre vraiment de Toi, Pain du ciel.
Aide-nous à devenir ta «bonne odeur», à rendre perceptibles les traces de
ta vie en ce monde. De même que le grain de blé se relève de terre, forme
une tige puis un épi, de même, tu ne pouvais rester dans le tombeau: le
tombeau est vide, parce que lui – le Père – ne t’a pas «abandonné à la
mort, et ta chair n’a pas connu la corruption» (cf. Ac 2,31; Ps 15, 10 LXX).
Non, tu n’as pas connu la corruption. Tu es ressuscité et, à la chair
transformée, tu as ouvert un espace dans le cœur de Dieu. Fais que nous
puissions nous réjouir de cette espérance et que nous puissions la porter
joyeusement au monde, fais de nous des témoins de ta résurrection.
ZF05032407
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« Nous invitons à collaborer avec Oasis », par le card. Scola
Présentation à l’UNESCO
CITE DU VATICAN, Jeudi 24 mars 2005 (ZENIT.org) – « Nous invitons à
collaborer avec Oasis quiconque le souhaite avec sincérité, certain de la
nécessité de contribuer à accompagner, avec un authentique esprit
critique, ce complexe mais irrépressible processus de métissage de
civilisations. C’est seulement ainsi finalement que pourra se réaliser
l’augure que contient aussi le mot « arabe » qui exprime le concept
d’intégration: le devenir réciproquement accomplis, parfaits », écrit en
conclusion de son intervention à l’UNESCO, le 15 mars, à Paris, le
cardinal Angelo Scola, Patriarche de Venise, lors de la présentation de la
revue « Oasis », pour le dialogue et la rencontre entre chrétiens et
musulmans (cf. ZF050316, et le site http://www.edizionicantagalli.com/oasis/index.html).
Voici le texte intégral (revue et corrigé par l’auteur) de
l’intervention du cardinal Scola.
« Et ainsi toujours j’admirerai toutes les nobles personnes, de toutes
lignées et de toutes origines »
Une donnée importante
La situation géopolitique actuelle est délicate et cela n’échappe à
personne, les doutes s’accumulent au sujet de la cohabitation pacifique
des peuples, mais l’on connaît aussi les nouveaux horizons que les
événements historiques actuels ouvrent aux individus, aux communautés et
aux nations.
C’est précisément la considération attentive de cette réalité
ambivalente qui a fait se réunir, il a près d’un an à Venise, diverses
personnalités du monde chrétien (laïcs, prêtres et évêques) pour donner
vie à un projet – d’une idée née des paroles prononcées par le Saint Père
Jean-Paul II à la Mosquée Omeyyade de Damas – que nous avons choisi
d’intituler de manière significative Oasis. Le «nous» indique avant tout
les Archevêques de Budapest, Lyon, Wien, Zagreb, le Préfet de la
Congrégation de l’Evangélisation des Peuples, l’Archevêque de
Changanacherry, l’Archevêque de Tunis, l’Archevêque de Grenade, l’Evêque
d’Islamabad, l’Evêque auxiliaire d’Arabie, qu’avec le patriarche de Venise
constituent le Comité promoteur d’Oasis. D’une façon plus complète Oasis
indique à la fois un réseau d’amis chrétiens duquel est né un Centre
international d’études et de recherche et une Revue.
Le projet est né à l’intérieur du Studium Generale Marcianum, qui a vu
la lumière à Venise comme une forme de renouvellement de l’action
pastorale du Patriarcat. Si pour nous européens le nom «Oasis» sonne comme
une transposition un peu exotique du locus amoenus de mémoire
platonicienne, une sorte de jardin où il est agréable de s’entretenir et
de converser, l’oasis est bien plus chère à l’homme du désert: et de fait
il n’est pas étonnant qu’elle soit devenue, dans la Genèse comme dans le
Coran, le paradigme même du Paradis.
Métissage de civilisations
Pour illustrer ce projet au nom engageant, mais nous l’espérons aussi
de bonne augure, nous partirons d’une considération générale.
En lien avec la soi-disant globalisation et avec la «civilisation des
réseaux» nous assistons, ces dernières décennies, à un processus inédit de
mélange des peuples, que j’ai voulu définir, avec une métaphore un peu
hardie, par l’expression métissage de civilisations – dans laquelle il
faut évidemment souligner fortement le génitif «de civilisations». Non que
la rencontre des peuples soit une absolue nouveauté, au contraire
l’histoire de l’humanité est parsemée de migrations et de mélanges.
Pensons à ce qu’ont pu signifier les migrations des peuples germaniques à
travers l’empire romain ou l’invasion mongole dans le califat abbasside.
Le fait nouveau est qu’aujourd’hui le phénomène investit la planète
entière. Le processus, souvent tumultueux et chargé de contradictions, est
irrépressible et en tant que processus, s’engendre de fait et pousse les
libertés en jeu à l’orienter.
Un aspect important de ce mélange de peuples réside dans sa nature
«bidirectionnelle» inédite. En effet si de nombreux habitants des pays en
voie de développement partent chercher fortune en Europe, en Amérique du
Nord ou en Australie, il est tout aussi vrai que chaque année des millions
de personnes visitent, pour des raisons professionnelles ou pour tourisme,
les régions les plus reculées du globe. Malgré ses limites évidentes, le
tourisme a contribué à rompre les barrières de l’isolement.
C’est sur ce processus et sur ses implications culturelles que Oasis
souhaite travailler. En témoigne entre autres la composition du Comité
scientifique d’Oasis, qui réunit des personnalités aussi bien occidentales
qu’orientales, pour un travail commun qu’il eût été difficile d’imaginer
il y a encore quelques années. Le choix du multilinguisme (la revue est
publiée en effet sous quatre versions bilingues) est dicté par le même
désir: nous aurions pu publier une revue tout en français, ou en anglais,
ou en arabe. Mais nous avons choisi de faire coexister les langues, les
unes à côté des autres, même si la difficulté de l’impression ne nous
permet pas pour le moment un rapport quantitativement égal entre les
langues arabes et urdu, et les langues occidentales.
Evidemment, un phénomène aussi nouveau que le métissage de
civilisations implique d’immenses problèmes et requiert une grande
capacité créative pour trouver des solutions adéquates. Dans le monde
occidental le débat tend à se focaliser sur des questions de nature
principalement juridique, avec la conviction qu’il est urgent de fournir
un cadre législatif solide dans lequel accueillir les individus qui
viennent progressivement faire partie de notre société. Dans les faits,
cette position met en lumière un aspect important du problème, mais peut
aussi cacher la tentation stigmatisée par le poète Eliot d’imaginer «des
systèmes tellement parfaits que plus personne n’aurait besoin d’être bon».
A notre avis, la voie possible est celle du témoignage – entendu dans
un sens pratique et théorique – auquel nul homme ne peut se soustraire en
vertu du risque immanent à la liberté. Il est vain de croire qu’à l’homme
peut être épargnée l’aventure de la rencontre de l’autre, puisque chacun
de nous naît et grandit grâce aux rapports avec autrui. C’est précisément
à ce niveau que la revue Oasis entend apporter sa propre contribution:
elle ne se situe donc pas dans un champ académique ou scientifique, mais
bien plutôt culturel, au sens large et noble du terme. Pour les chrétiens
il serait mieux de parler d’action pastorale.
Témoignage, voie de la rencontre
Le terme de « témoignage » risque de soulever d’emblée un problème.
Puisque, on le dit, le témoignage implique une identité et puisque
l’affirmation de sa propre identité est généralement perçue comme
opposition à la rencontre de l’autre, il faudrait donc conclure qu’une
position exclut l’autre: ou bien l’on rencontre, ou bien l’on témoigne.
Dans notre cas spécifique, s’agissant d’une revue lancée par des
chrétiens, l’on serait tenté de conclure que celle-ci s’adresserait
seulement aux communautés chrétiennes qui vivent en Occident et dans les
pays musulmans. Pour parler aussi avec les «autres», il faudrait un autre
style, un autre point de départ, en somme, une autre revue.
Je crois qu’il s’agit d’une alternative culturelle insidieuse, sur
laquelle il vaut la peine de s’arrêter brièvement.
S’ils considèrent attentivement l’histoire, les porte-drapeau de
l’incorrigible opposition entre identité et rencontre trouveront de
multiples démentis. Pensons par exemple à la transmission du savoir
classique. Qui ne reconnaît pas l’importance capitale de la relecture des
textes grecs pour le progrès de la civilisation abbasside? Et qui n’admet
pas le rôle important, dans une Europe qui avait déjà connu l’héritage
classique grâce à l’œuvre patiente des moines, que joua l’adoption de la
réflexion philosophique et scientifique arabe? Il me semble que le poète
arabe al-Buhturi était aussi conscient de cette dialectique entre
rencontre et identité lorsque, vers la moitié du IXème siècle, après avoir
admiré les ruines du palais persan à Ctésifonte, sortit dans l’expression:
«Et ainsi toujours j’admirerai toutes les nobles personnes, de toutes
lignées et de toutes origines».
L’histoire mentionne aussi les oppositions féroces qui sont apparues
quand l’identité s’est montrée exclusive, mais ceci, plutôt que de nous
décourager doit nous mettre en garde au présent.
En réalité, la possibilité même de la rencontre réside dans
l’inépuisable recherche de la vérité entendue dans un sens dynamique,
vivant et personnel, de la part du cœur de l’homme, qui à toutes les
latitudes palpite pour les mêmes désirs, vivant chaque jour d’affects et
de travail. S’il n’en était ainsi, l’on ne saurait justifier le fait que
les cultures humaines, même dans leur évidente diversité, se comprennent
mutuellement: peut-être au terme d’un long chemin vers des langues et des
catégories, d’abord très lointaines entre elles, mais pour finir
mutuellement compréhensibles.
C’est mue par cette conviction qu’Oasis entend se proposer. Avec une
identité dynamique et par-là même ouverte à l’autre. En reconnaissant
l’œcuménisme et la théologie des religions comme une dimension essentielle
de l’expérience chrétienne, Oasis interpelle tout homme de bonne volonté –
qu’il soit chrétien, musulman, d’une autre religion, athée ou agnostique –
et l’invite à s’exposer en première directement en s’engageant dans l’une
œuvre commune sur le sens de la personne, de la communauté et de la
famille des peuples. Et ceci sans craindre de proposer à la liberté de
l’autre ce que pour lui est la vérité, sans omettre de demander qu’une
libre confrontation de ce type soit possible partout dans le monde, comme
génératrice de culture nouvelle.
En fait la liberté est pour la vérité. Depuis la philosophie grecque
ceci représente un point d’appui indiscutable de la pensée européenne. Il
a été plus difficile pour la pensée européenne de comprendre le principe
pourtant ineffaçable de la vérité de la liberté.
L’athéisme pratique comme «destin de la modernité européenne» naît de
la défense de la liberté de l’homme qui va jusqu’à postuler, au minimum,
l’impossibilité de reconnaître la vérité. A partir de l’époque moderne la
liberté finie – dans son désir constitutif, dans son indomptable effort
technico-scientifique de «posséder» l’homme et le cosmos et dans sa
tentative d’édifier des modes de vie civile, économique et politique
appuyées par un bon gouvernement – a cru devoir exiger, pour le moins, le
renoncement à la question de la vérité absolue: d’où la censure de la
question de Dieu.
La révélation biblique contient en revanche un noyau théorique que
l’homme post-moderne est en train de redécouvrir. La vérité est la
rencontre qui advient entre le fondement absolu et transcendant et l’homme
(mystère, Trinité). Le Fondement se révèle à l’homme dans tout acte de
liberté, l’appelant à s’impliquer. Ceci se fonde sur un Dieu qui «se
compromet» dans l’histoire pour venir à la rencontre de l’homme.
Dans la tradition chrétienne, la vérité, même si elle garde tout son
caractère d’absolu, est vérité vivante et personnelle. Elle ne craint donc
pas de se livrer à la liberté finie de l’homme. L’événement de Jésus
Christ en lui-même en est une preuve décisive. Il n’y a pas liberté pour
la vérité qui ne soit pas, en même temps, vérité de la liberté.
Selon ces présupposés, nous invitons à collaborer avec Oasis quiconque
le souhaite avec sincérité, certain de la nécessité de contribuer à
accompagner, avec un authentique esprit critique, ce complexe mais
irrépressible processus de métissage de civilisations. C’est seulement
ainsi finalement que pourra se réaliser l’augure que contient aussi le mot
« arabe » qui exprime le concept d’intégration: le devenir réciproquement
accomplis, parfaits.
***
Dīwān al–Buhturī, ed. Hasan Kāmil as–Sayrafī, 4 tomi, al–Qāhira, Dār
al–Ma‘ārif, 1963-1964, qasīda n. 470 ,tomo II, p. 1162, v. 56.
Studium Generale Marcianum, Venise 2004.
Le Larousse parle de «production culturelle résultant de l’influence
mutuelle de civilisations en contact». Le terme a été employé dans un
autre contexte par J. L. AMSELLE: Logiques métisses, Payot, Paris 1990;
Collectif, La Pensée Métisse. Croyances africaines et nationalité
occidentale en question, PUF, Paris-Cahiers de l’IUED, Genève 1990; M.
SERRES, Le tiers-instruit, Bourin, Paris 1991; F. LAPLANTINE e A. NOUSS,
Le Métissage, Flammarion, Paris 1997; S. GRUZINSKI, La Pensée métisse,
Fayard, Paris 1999. Dans le monde anglo-saxon existent de nombreuses
œuvres sur le thème proche de la hybridity: cfr. par exemple F. J. C.
YOUNG, Colonial Destre. Hybridity in Theory, Culture and Race, Routledge,
London-New York 1995.
T. S. ELIOT, Cori da « La Rocca » VI
Dīwān al–Buhturī, ed. Hasan Kāmil as–Sayrafī, 4 tomi, al–Qāhira, Dār
al–Ma‘ārif, 1963-1964, qasīda n. 470 ,tomo II, p. 1162, v. 56.
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