La naissance ...des parents

Dossier : la famille

Présentation:

Chef du service de gynécologie-obstétrique de l'hôpital de Creil (Oise), Paul Cesbron publie La Naissance en Occident (Éd. Albin Michel). Dans cet ouvrage, écrit avec l'historienne Yvonne Knibiehler, il montre comment l'accouchement s'est médicalisé au cours du XX' siècle, au point de réduire la naissance à sa seule dimension biologique.
 

Extraits: 

l'Occident considère aujourd'hui l'accouchement comme un acte médical. .... Notre foi dans la science a abouti à une situation qui ne respecte plus les femmes. Celles-ci ont été dépossédées de la responsabilité de leur accouchement  ....C'est un événement fondateur au niveau psychique et affectif, un moment d'apprentissage de la vie qui appartient aux parents ... des maternités de petite taille et non dans des « usines à bébés » ... redonner à la naissance sa dimension humaine, fondatrice et symbolique.

résonances :

les usines bébés... voilà bien l'industrialisation de l'humain... du veau en stabulation.

en io-relation ....

coque, famille, interrelation, ensembles-homocoques... ensemble-HOMENTRANCHE, individualisme,... Amour...

 

 

 

Redonner à la naissance sa dimension humaine, fondatrice et symbolique.

Auteur:  Paul Cesbron

Source: Le le Figaro du 9 novembre 2004



LE FIGARO. - Comment l'accouchement a-t-il évolué dans les pays occidentaux au cours du XX' siècle ?

Paul CESBRON. - Jusqu'à la fin du XIX' siècle, l'accouchement est une affaire de femmes. Il se passe à domicile, avec l'aide de sages-femmes, et les médecins n'interviennent que dans les cas les plus délicats. Mais à la fin du XIXa siècle, les médecins parviennent à réduire considérablement la mortalité des femmes et des bébés et à améliorer les techniques d'accouchement. Encouragés par ces progrès, ils affirment alors que l'accouchement doit être confié aux chirurgiens. Les sages-femmes se voient retirer les instruments, ainsi que la possibilité de prescrire des médicaments. Depuis, l'obstétrique a réalisé des avancées encore plus spectaculaires (diagnostics prénataux, péridurales, césariennes...) et la médicalisation des accouchements est devenue la règle. Si les sages-femmes françaises ont récemment retrouvé le droit de prescrire des médicaments, l'Occident considère aujourd'hui l'accouchement comme un acte médical.

Quelles sont, selon vous, les conséquences de cette médicalisation ?

Notre foi dans la science a abouti à une situation qui ne respecte plus les femmes. Celles-ci ont été dépossédées de la responsabilité de leur accouchement : aujourd'hui, ce ne sont plus elles qui mettent les bébés au monde, mais les médecins. Beaucoup de femmes semblent l'accepter. En revanche, d'autres refusent qu'on les « disqualifie » ainsi et qu'on nie leur capacité à donner naissance à leur enfant. Je pense qu'il est nécessaire que notre société - et bien sûr les femmes en premier lieu - débatte autour de la question suivante : les médecins peuvent-ils mettre les bébés au monde tout seuls ?

Dans ce débat, vous prenez clairement partie, en vous opposant à la médicalisation systématique des accouchements...

Oui. La mise au monde d'un bébé fait partie de l'histoire individuelle de chacun. C'est un événement fondateur au niveau psychique et affectif, un moment d'apprentissage de la vie qui appartient aux parents et qui doit rester intime. L'interposition d'un autre constitue donc une intrusion insupportable. Bien sûr, il est parfois indispensable que les médecins interviennent techniquement, mais cette assistance ne doit pas dessaisir les parents de l'acte de, la mise au monde. Aujourd'hui, il faudrait que les médecins soient attentifs à la volonté des mères. Et il serait nécessaire de créer les conditions pour que celles-ci puissent assumer, quand cela est possible, la responsabilité « physique » de leur accouchement.

Comment pourrait-on redonner aux femmes ce pouvoir de maîtriser leur accouchement ?

Dans l'immense majorité des cas, il est désormais possible de prévoir si un accouchement va être problématique ou non : nous pouvons savoir dans quelle position est le bébé, quel est son poids, s'il présente des malformations... Lorsqu'il existe un risque que l'accouchement soit compliqué, la présence d'un médecin est indispensable. Mais dans les autres situations, nous devons permettre aux femmes de mettre leur bébé au monde dans des maternités de petite taille (et non dans des « usines à bébés » hypermédicalisées), dans des maisons de naissance dirigées par des sages-femmes ou même à domicile. Il ne s'agit pas d'une volonté de retour en arrière : il s'agit au contraire de profiter de la connaissance scientifique dont nous disposons pour redonner à la naissance sa dimension humaine, fondatrice et symbolique. Nous ne devons pas laisser le progrès technique s'imposer à nous sans le soumettre à une véritable réflexion.

Propos recueillis par Catherine Balle

 

 

 

texte hébergé en  11/04

 

 

 

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 voir " Eclats de Coq(ue)s antérieurs" auquel ce document était joint

 

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