Extrait de l'article....
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Il y a quelque chose que, je crois, on
a essayé de vous cacher, durant toutes ces années, et si on l'a fait
avec une telle ardeur et une telle efficience, je suppose qu'il y avait
d'excellentes raisons pour cela.
Ce qu'on a essayé de vous cacher
c'est que LES MOTS AVAIENT UN SENS.
Et pourquoi donc a t-on fait cela ?
Précisément parce que dès que l'on comprend que les mots ont un sens,
on saisit qu'ils sont des pensées mises en actes, et qu'ils sont en
mesure non seulement de « transformer le monde » (abstraction
néo-darwiniste que les sociétés sans avenir emploient communément) mais
bien, littéralement, de le faire, ou le défaire.
Il fallait donc vous empêcher de
comprendre que tous ces mots, qu'on allait laborieusement empiler telle
une tour de briques sans la moindre cohérence, sinon celle du vide,
recelaient, en dépit de tous les efforts déployés pour l'anéantir,
encore un sens. Il fallait vous empêcher de comprendre que tous ces
mots, qu'on allait essayer de vous faire acheter, grâce à une bonne
campagne de publicité, étaient en mesure de faire ou de défaire un
monde.
Il fallait vous empêcher de penser à
la gravité presque indicible de votre acte.
Il fallait vous empêcher de penser
tout court, c'est à dire de mettre en mots vos actions, et vos mots en
action. Il fallait, par exemple, vous empêcher tout bonnement de LIRE.
De LIRE LES MOTS.
LES VRAIS MOTS.
CEUX QUI ONT UN SENS.
CEUX QUI CRÉENT ET QUI DÉTRUISENT
DES MONDES.
Comme je l'ai rappelé plus haut, la «
constitution » invertébrée du mollusque que l'on veut fabriquer à
Bruxelles est composée d'au moins 400 amendements chargés
d'harmoniser ce « machin » qui n'est rien d'autre qu'un comité de
syndics de propriété.
On pourrait probablement passer en
revue chacun de ces articles, de demi-solde, et y trouver de quoi
sustenter notre rire pour quelques siècles mais, je pense que personne
ne l'a vraiment noté, notre explosive hilarité aurait dû s'initier bien
avant.
Dès l'apparition du CHIFFRE.
400.
C'est à dire plus de 10 fois le volume
de la Constitution américaine !
Ce CHIFFRE est un MOT.
Il a un sens.
Un sens ésotérique. Et ce sens est
mystérieusement mis en lumière lorsque l'on compare, non pas le volume,
ni même le contenu des amendements des deux constitutions, mais tout
simplement lorsque l'on s'amuse à LIRE leurs préambules respectifs.
Et même, il faut aller jusque là,
comme dans une étude sur les fractales, descendre jusqu'à l'atome
fondamental, l'élément « constitutif », c'est à dire aux TOUS PREMIERS
MOTS qui ouvrent chacune des deux « constitutions ».
Il faut simplement laisser LES MOTS
DIRE CE QU'ILS ONT À DIRE.
La Constitution des États-Unis
d'Amérique, rédigée en 1776, commence très exactement par ces mots :
WE, THE PEOPLE...
Un peu plus loin, vous notez
l'occurrence d'un : UNDER THE LAW OF GOD.
La "constitution" zéropéenne qu'on a
le toupet de vous présenter comme le fondement possible d'une quelconque
"union politique" commence, elle, par ces mots ci :
NOUS, SA MAJESTÉ LE ROI DES BELGES,
suivis de toute la nomenclature des Chefs d'État, classés par ordre
alphabétique (!), c'est à dire de tous ceux qui aujourd'hui vous
ordonnent presque de voter comme il faut, bien rangés dans leur mausolée
verbal qui préfigure assez bien le colossal tombeau de famille que l'on
est en train de vous construire.
We, the people...
Nous, Sa Majesté le Roi des Belges...
Chaque fois qu'un soprano du
OUI-OU-RIEN fait désormais élever sa voix de castrat, en dépit des
efforts que je prodigue pour échapper aux nouvelles, je ne peux
m'empêcher de me répéter ces DEUX PHRASES : We, the people. Nous, Sa
Majesté le Roi des Belges.
Répétez les vous aussi, à l'occasion,
en cas de doute, si jamais une émission spéciale avec Drucker et
Ardisson, improvisée sous la forme d'un Eurothon, finissait par ronger
votre instinct, pourtant de plus en plus sûr, au vu des derniers
sondages d'opinion.
We, the people...
Nous, sa Majesté le Roi des...
En deux petites locutions, vous avez
effectivement le choix, comme illuminé d'une aveuglante clarté.
Avec ces deux préambules, avec ces
deux fractales de MOTS DONT LE SENS FAIT OU DÉFAIT LES MONDES, vous avez
face à vous l'alternative entre la mort et la vie, entre le faux oui et
le vrai non, vous avez le choix entre NEIN ET NIET.
Vous avez le choix de faire comme
les peuples de ce qui fut l'Est communiste en prenant, pour de bon,
votre destinée manifestement en main, ou de finir, sans doute assez
benoîtement, par disparaître de l'Histoire des hommes.
Maurice G. Dantec
Montréal, le 1er mai 2005