La coïncidence entre le centenaire 
          de la loi de 1905 et la manifestation violente du malaise social qu'a 
          traversé toute la France nous oblige à nous poser la question de la 
          place des religions dans notre société. L'isolement croissant des 
          personnes et la difficulté d'entrer en relation avec autrui nous 
          mettent face à une réalité : nous vivons actuellement une crise du 
          sens, de la reconnaissance, et de la confusion des rôles. Alors, 
          dans ce contexte, faut-il reléguer le fait religieux à un sentiment 
          individuel que la sphère publique doit ignorer, ou faut-il lui 
          reconnaître une dimension sociale dont notre société a besoin ? Le 
          fait religieux appartient-il au passé ou est-il au contraire un acteur 
          incontournable de la paix sociale ? 
          Nous avons assisté à une perte du 
          sens religieux institutionnel, qui contribuait pourtant à structurer 
          la personne, à lui donner des repères tout comme le faisaient d'autres 
          organisations non religieuses telles que les syndicats ou les partis 
          politiques. L'aspiration religieuse ou spirituelle, la quête du 
          sens de l'existence et de la transcendance, est malgré tout très forte 
          aujourd'hui. Elle n'est souvent plus le résultat d'une éducation, mais 
          d'une recherche personnelle, qui rend l'adhésion d'autant plus forte.
          Si l'Etat n'a pas à s'immiscer dans l'organisation de cette 
          «aspiration», il a toutefois à se préoccuper du phénomène religieux et 
          à donner du contenu au principe de laïcité. 
          Après les multiples débats du XXe 
          siècle sur l'interprétation de la laïcité à la française, nous entrons 
          dans une ère plus pacifique des relations avec les religions et des 
          religions entre elles. Le Forum des républicains sociaux a rappelé son 
          attachement à ce principe de laïcité qui repose sur deux piliers : la 
          liberté religieuse (qui inclut nécessairement la liberté de 
          conscience) et la neutralité de l'Etat. Le Forum souligne que la 
          liberté religieuse n'est pas seulement la liberté du culte, à laquelle 
          la loi de 1905 donne un statut satisfaisant, mais également la liberté 
          de faire éduquer ses enfants selon ses convictions et d'exprimer 
          celles-ci publiquement. Le principe de laïcité n'interdit 
          aucunement de croire en Dieu, de pratiquer une religion ni de le 
          manifester d'une façon ou d'une autre, voire de s'exercer au 
          prosélytisme. Chacun est libre d'adhérer à la religion de son choix, 
          dès lors que ce choix s'effectue sans contrainte, et d'exprimer 
          publiquement son appartenance, fût-ce dans un lieu public, tant que 
          cette expression ne porte atteinte ni à la liberté des autres, ni à 
          l'ordre public, ni à la participation du croyant à la vie collective à 
          laquelle l'oblige sa qualité de citoyen ou de résident sur le sol 
          national. 
          
          
          Réduire le fait religieux à la 
          sphère strictement privée, c'est rendre l'homme schizophrène : comment 
          peut-on penser différemment en privé et en public ? Comment 
          peut-on sereinement agir en chrétien, en musulman, ou en juif en 
          privé, et en athée en public ? Quelle forme de totalitarisme pourrait 
          prétendre gouverner ainsi au for interne des personnes ? Aucune 
          dictature n'a réussi à porter une telle atteinte à l'unité de la 
          personne, tant elle relève de la liberté intérieure sur laquelle rien 
          ni personne ne peut avoir prise. 
          Reléguer le fait religieux à la 
          sphère privée reviendrait par ailleurs à renier que l'homme est un 
          être personnel et social et que sa dimension sociale comprend une 
          dimension spirituelle. La laïcité respectueuse des religions 
          reconnaît l'homme dans sa diversité et sa complémentarité. Le fait 
          religieux contribue ainsi à poser les règles du vivre ensemble. 
          
          Pour répondre à la fragilisation de 
          nos liens sociaux, il serait irresponsable de ne pas reconnaître le 
          rôle des religions et de ne pas les associer à la refondation de notre 
          unité nationale. Ne contraignons pas les religions à se replier sur 
          elles-mêmes et à rentrer dans une logique de revendication 
          communautariste et sectaire. Donnons-leur la possibilité d'être 
          acteurs d'intégration, à leur juste place. Cela implique que nous 
          initiions une politique de coopération tant nationale que locale, qui 
          implique un dialogue confiant et naturel à tous les échelons de la vie 
          politique. Les religions, et plus spécifiquement les religions 
          chrétiennes, qui ont eu un rôle déterminant historiquement et 
          culturellement dans la construction de l'identité française, sont une 
          composante de la vie sociale et doivent à ce titre participer à la vie 
          de la communauté nationale. 
          *Député UMP des Yvelines, présidente 
          du Forum des républicains sociaux