près ceux des
végétaux et des animaux, les patrimoines héréditaires des organismes
humains pourront-ils bientôt être génétiquement modifiés ? Rien,
désormais, n'interdit de le penser. Une nouvelle étape en ce sens
vient d'être franchie, a révélé le Sunday Times, dimanche 11
mai. Selon le journal britannique, des scientifiques américains sont
récemment parvenus à créer un embryon humain génétiquement modifié.
Cet embryon transgénique n'a toutefois pas été transplanté dans un
utérus et a été détruit après cinq jours de développement in vitro.
Des expériences similaires pourraient bientôt être menées au
Royaume-Uni.
Le travail américain avait
initialement été présenté en février, lors d'une rencontre
scientifique, avant de faire l'objet d'une publication dans la revue
spécialisée Fertility and Sterility, sans que cela suscite
d'émotion particulière au sein de la communauté des biologistes de la
reproduction. Dirigés par Nikica Zaninovic, les chercheurs, qui
travaillent au sein de l'université Cornell de New York, ont eu
recours aux techniques de la thérapie génique. Développées depuis
plusieurs décennies, celles-ci visent à corriger certaines anomalies
structurelles du génome humain. Il s'agit, schématiquement, de
greffer, au sein de certaines cellules cibles d'une personne malade,
des fragments d'information génétique afin de corriger les effets
pathologiques d'une mutation à l'origine d'une affection.
L'équipe américaine a mis au point
sa méthode chez la souris avant de l'appliquer à l'homme, en dehors de
tout objectif thérapeutique direct. Cette expérience a été menée sur
un embryon humain conçu initialement dans le cadre d'un programme de
procréation médicalement assistée. Les chercheurs américains annoncent
être parvenus à intégrer au sein du génome de cet embryon humain, au
moyen d'un vecteur viral, un gène dirigeant la synthèse d'une protéine
aux propriétés fluorescentes.
Le même objectif pourrait être
atteint en modifiant artificiellement le génome des cellules
sexuelles, masculine ou féminine, avant de procéder à une fécondation
in vitro. Ce type d'expérimentation a d'ailleurs été réussi aux
Etats-Unis, à plusieurs reprises, en 2007, chez le poulet.
DANGERS POTENTIELS
Les chercheurs américains
soutiennent que seuls de tels protocoles expérimentaux sont de nature
à faire progresser la biologie humaine fondamentale et la
compréhension des affections d'origine génétique. Ils ont notamment
d'ores et déjà réussi à obtenir des lignées de cellules souches à
partir d'embryons de souris transgéniques.
A l'inverse, certains observateurs
soulignent les dangers potentiels qu'il y aurait à autoriser ce type
de travaux sur des embryons humains. Ils font valoir, en substance,
que les techniques développées permettront bientôt non seulement de
corriger des anomalies génétiques mais aussi de modifier, à des fins
non thérapeutiques, les performances d'un organisme humain. De fait,
rien n'interdit d'imaginer que ces nouveaux outils moléculaires
permettent, à terme, d'améliorer certaines caractéristiques physiques
ou cognitives des êtres humains.
En Grande-Bretagne, où la création
d'embryons chimères "homme-animal" est depuis peu autorisée, la Human
Fertilisation and Embryology Authority s'est saisie de cette nouvelle
question tout en refusant, pour l'heure, d'autoriser la modification
génétique des cellules sexuelles humaines. En France, l'Agence de
biomédecine n'a encore pris aucune position sur ces délicates
questions éthiques.
Article paru dans l'édition du
14.05.08.