De notre correspondant permanent aux États-Unis
Loi sur l’immigration
Complot pour un bloc nord-américain (I)
Une loi peut toujours en cacher une autre plus
sournoise, plus pernicieuse. Mais une loi peut également
dissimuler un complot, ou plus exactement en devenir l’amorce
avant d’en constituer l’un des instruments. Une simple loi
d’autant plus décisive, d’autant plus prometteuse qu’elle semble
en apparence nécessaire et même souhaitable dans son principe :
muée en détonateur d’une opération secrète et illégale, elle
s’inscrit dans la durée avec l’exacte définition du complot.
Scénario explosif, qui commença à dérouler ses discrètes petites
étapes dans la moiteur d’un été livré aux vacanciers insouciants,
aux détentes parlementaires, mais où les calculs manœuvriers
n’étaient jamais loin. Petites étapes en forme d’éléments d’un
vaste puzzle qui se verra complété au cours des prochaines années.
Pour l’instant, nous n’en sommes qu’aux trois coups sur une scène
en demi-teintes où les masques tiennent lieu de costume et où les
élus passent pour des acteurs.
Le 27 juin dernier, le premier lever de rideau découvrit
les cent sénateurs qui venaient de s’exprimer sur un texte de plus
de mille pages dont l’hypocrite ambition était de poser la pierre
angulaire de ce que l’intoxication officielle appelle pompeusement
« la nouvelle politique d’immigration ». Déjà, l’imposture
annonçait le complot. Il était tout entier visible en filigrane
dans les décors. On y voyait intimement mêlées luxuriance
canadienne, variété américaine, aridité mexicaine. Les trois pays
n’avaient plus de nom ni de frontières. Les Etats-Unis
disparaissaient dans un immense bloc globaliste, uniforme, gris –
sans visage.
La toute première goutte d’acide visant à moyen terme la
dissolution des structures qui constituent l’Amérique comme Etat
indépendant fut donc versée ce 27 juin par une nette majorité de
68 sénateurs. Une goutte corrosive sur le problème le plus
épineux, le débat le plus passionné, le dossier le plus vulnérable
de ce grand corps de 330 millions de cellules : l’immigration,
autrement dit l’entrée, l’installation et la prolifération de
l’étranger dans une société dont il peut, par sa seule présence,
bouleverser la nature en transformant les mœurs, la mentalité, la
culture. L’immigration apparaît dans tous les pays comme le levier
subversif par excellence, le brûlot dévastateur par définition,
celui qui permet d’édulcorer les caractères communautaires, de
brouiller les repères ancestraux, de noyer le sens d’un destin.
C’est vrai dans la vieille Europe. C’est peut-être encore plus
vrai de ce côté-ci de l’Atlantique. Ceux qui cherchent à ruiner ce
Nouveau Monde tel qu’il fut conçu par ses Pères fondateurs ne
disposaient pas de meilleur agent destructeur que l’ouverture
silencieuse des portes, le fonctionnement régulier des sas, en un
mot, le simple et vigilant maintien de la scandaleuse porosité de
la frontière sud. C’est par là que sont passés la plupart des
vingt millions d’illégaux qui vivent depuis deux décennies dans
l’ombre clandestine. C’est par là que passeront encore les
cohortes tiers-mondistes qui renforceront, sans éclat et sans
drame, la marginalisation de l’otage blanc. L’invasion est un
concept qui, ici, ne répand pas la terreur. Dommage.
Dommage qu’il n’y ait eu le 27 juin que 32 opposants –
tous républicains – à se dresser comme un seul homme contre cette
machination qui, en quelques années, risque de transformer plus
sûrement l’Amérique qu’elle ne le fut pendant deux siècles.
Dommage qu’il n’y ait pas eu, au cours des mois ayant précédé
cette forfaiture, plus d’indignation dans le pays contre ce que
tramait à Washington un establishment devenu apatride et
vagabond à force d’être vendu au nouvel ordre mondial. Dommage que
l’on n’ait pas senti dans les mouvements nationaux le sursaut des
grands moments, la fureur des grandes angoisses qui, parfois,
sortis des entrailles d’un peuple, arrêtent le couteau des
conjurés et font dévier l’histoire.
Face au spectre de l’invasion dissolvante qui s’annonçait,
il n’y eut ni marches ni manifs, à peine quelques slogans criés
dans les rues par les militants d’un autre ordre ayant régné jadis
sous d’autres cieux et sous une autre croix. C’est peu. C’est peu
lorsque l’on prend connaissance des trois grands objectifs que se
sont assignés les 68 spadassins de cette démocratie fétide et
totalitaire : assurer les vingt millions d’illégaux vivant dans le
pays – le chiffre officiel de onze millions n’est qu’un mensonge
de plus – qu’ils bénéficieront d’une amnistie conduisant
directement à la citoyenneté ; chasser les craintes de l’Américain
moyen en lui faisant croire que tout sera mis en chantier pour
verrouiller sérieusement la frontière sud ; enfin, tranquilliser
le capital – gros et petit – en lui montrant que les mesures
interdisant l’embauche des clandestins ne sont, en réalité, que de
la poudre aux yeux.
Coup double pour la subversion. D’une part, les « 68 »
ont montré qu’il était possible de mettre en place une formidable
pompe aspirante d’illégaux qui pourrait fonctionner indéfiniment
et sur une échelle démesurée, puisqu’on a calculé qu’entre le Rio
Grande et la Terre de Feu, plus de 50 millions de personnes
seraient en permanence candidates au départ pour l’Eldorado.
D’autre part, en dépassant de huit voix le seuil où un
filibuster – obstruction parlementaire par un élu qui conserve
la parole interminablement – devient une arme inévitable entre les
mains de l’opposition, les « 68 » ont réussi à humilier le parti
républicain dont les transfuges, au nombre de quatorze, prouvent
assez la désunion et le désarroi.
Mais la bataille au sénat n’est que le premier acte de
cette tragédie. Le suivant se jouera plus tard à la Chambre des
représentants puisque le bicaméralisme exige l’accord des deux
assemblées sur un même projet de loi. On assistera à des navettes,
des négociations, des compromis car la Chambre, à l’inverse du
sénat, est, elle, contrôlée par les républicains. Leur président,
John Boehner, a déjà fait savoir qu’il n’était pas question
d’accepter le diktat des « 68 ». Il y aura donc un texte écrit par
les députés, voté par les députés, qui percutera inévitablement
celui brandi par les sénateurs. Un choc se produira, puis
s’ouvrira une partie de bras de fer. Quand ? Le suspense pourrait
se compter en semaines ou en mois.
Les observateurs tombent d’accord pour souligner que
Boehner n’aura aucun mal à réunir une belle majorité parmi les 234
représentants républicains qu’il a sous son autorité. Une majorité
fermement décidée à prendre l’exact contre-pied du plan imaginé
par les « 68 » en dénonçant son fougueux machiavélisme, sa nature
antinationale, ses calculs destructeurs. La riposte se contentera
de suivre les axes de l’attaque : remettre un passeport américain
à vingt millions d’illégaux s’assimile à un scandaleux message
auquel ne manqueront pas de répondre de nouvelles marées de
clandestins toujours plus denses, toujours plus impatientes,
toujours plus manipulées par leurs protecteurs démocrates ;
promettre la construction de 1 200 kilomètres de palissade le long
d’une frontière sud qui en compte près de trois fois plus
s’apparenterait simplement à une mauvaise plaisanterie si l’avenir
de l’Amérique n’était pas résolument en jeu, si ce problème
d’étanchéité n’était devenu une triste fable ; annoncer son
intention de poursuivre les patrons embaucheurs d’illégaux revient
à duper les indécis, car le vrai but reste la consolidation d’une
ancienne et vicieuse habitude qui consiste à inonder le pays d’une
main-d’œuvre docile, à bon marché, pour casser les salaires.
Enfin, le coût de l’opération concoctée par les « 68 » (école,
hôpitaux, aides, prison) s’élèverait à 35 milliards de dollars par
an. Ainsi, non seulement la désarticulation de l’Amérique est-elle
programmée mais, en plus, c’est aux contribuables qu’on demande de
la financer.
(à suivre)
Phrase sortie : « L’immigration apparaît dans tous les pays
comme le levier subversif par excellence (…), celui qui permet de
brouiller les repères ancestraux, de noyer le sens d’un destin. »
CHRISTIAN DAISUG